Marietta KARAMANLI « Des propositions pour améliorer l’accès au dossier médical des patients et leur indemnisation en cas d’infections liées aux soins »

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Pendant près de quatre mois, j’ai participé à la mission d’information parlementaire sur l’indemnisation des victimes des maladies nosocomiales et l’accès au dossier médical. Cette mission, créée par les Commission des affaires sociales et la Commission des lois de l’Assemblée Nationale en décembre 2008, avait pour objectif d’évaluer la mise en Å“uvre effective des droits correspondants ouverts par la loi du 4 mars 2002.
Sur ma proposition, la mission a notamment visité le centre hospitalier du MANS et la clinique du Pré au MANS.
En juillet dernier, la mission a rendu son rapport.
Elle fait un certain nombre de propositions en vue d’améliorer la situation des patients.
Ma collègue Catherine LEMORTON et moi-même, représentantes du groupe socialiste, radical et citoyen au sein de la mission, avons donné un accord de principe aux principales améliorations en souhaitant parfois qu’elles puissent être précisées. Nous nous sommes par ailleurs opposés à certaines recommandations proposées par la mission ce qui a abouti à l’expression de deux réserves majeures sur le rapport.

1) Les améliorations proposées sont les suivantes.

La modification de la qualité des personnes pouvant exercer du vivant du patient le droit d’accès à son dossier médical : une extension sous garanties

Au patient lui-même et directement, à son médecin et aux titulaires de l’autorité parentale par l’intermédiaire d’un médecin, il est proposé de permettre son exercice à une personne ayant reçu mandat exprès du patient sauf s’il existe des relations contractuelles la liant au au patient (exemple un assureur ou un banquier qui pourraient vouloir connaître le risque que représente la personne malade ou encore un employeur qui souhaiterait connaître l’état de santé de son salari逦). Il est aussi souhaité d’accorder ce droit au tuteur d’une personne majeure protégée quand celle-ci ne peut exercer son droit et aux parents du mineur exerçant l’autorité parentale sauf opposition du mineur.

La modification des personnes pouvant exercer au décès du patient le droit d’accès à son dossier médical

Deux catégories de personnes ont le droit d’accès, les ayants droits (l(a)e conjoint(e), les enfants€¦) pour connaître des causes de la mort, défendre la mémoire du défunt ou faire valoir leurs droits. Il est proposé d’y adjoindre, les concubins et pacsés aux mêmes conditions que les ayants droits, les titulaires de l’autorité parentale sans motivation et sauf opposition du mineur.

Un meilleur encadrement de la délivrance des documents constituant le dossier médical et la possibilité d’une saisine de la commission régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux en cas de difficulté à y accéder

Des frais de reproduction à encadrer

Il est proposé que le droit d’accès qui s’exerce normalement gratuitement sauf frais de reproduction et d’envoi, puisse donner lieu à une estimation préalable de ces frais et que leur coût, actuellement libre puisse être encadré et plafonné par un ministériel.

Un règlement amiable en cas de difficultés d’accès
Parallèlement, est envisagée la saisine de la commission régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux en cas de difficultés à accéder de dossier. Est néanmoins posée la question de l’articulation de cette saisine avec la commission d’accès aux documents administratifs, a priori compétente pour statuer en cas de refus de l’établissement.

Parmi les autres recommandations figurent une possible amélioration de l’indemnisation des infections nosocomiales.

Améliorer l’indemnisation

La mission s’est prononcée en faveur d’une extension du régime d’indemnisation de plein droit aux infections associées aux soins contractées en médecine de ville, tout en soulignant que cette extension nécessitait que deux conditions préalables soient remplies, d’une part que soient mises en place une évaluation du risque nosocomial en cabinet libéral et une politique de lutte contre ce risque, « afin de permettre d’appréhender avec précision les conséquences que pourrait avoir une évolution du régime de responsabilité et de limiter autant que faire se peut ce risque » ; d’autre part que soient estimées les conséquences « assurantielles » de cette extension, et ce, en concertation avec les professionnels de santé, les établissements et les assureurs.

La mission s’est aussi montrée favorable à l’indemnisation de toutes les victimes de dommages liés à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins, quelle que soit la gravité des dommages subis. Actuellement seules les victimes ayant un taux d’incapacité permanente de 24 % fixé par un décret pris en application de la loi de mars 2002 (soit 1% de plus que le pourcentage maximal fixé par la loi) peuvent bénéficier de l’intervention du dispositif de règlement à m’amiable mis en place.

Enfin la mission a conclu à l’utilité de permettre à l’office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) de se substituer à l’assureur en cas d’offre manifestement insuffisante.

Etendre le dispositif d’information aux cabinets de ville

Est aussi souhaitée l’extension de l’obligation de déclaration des infections (accidents médicaux, infections nosocomiales, évènement indésirable associé à un produit de santé) aux professionnels et établissements aux médecins de ville, cette obligation valant que l’on parle plus largement des « infections liées aux soins ».

Dans le même ordre d’idées, il est proposé d’étendre le recueil des données s’y rapportant à l’office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM).

Garantir la qualité de l’expertise en cas de contentieux

Enfin, il est demandé que l’inscription sur la liste nationale des experts médicaux soit subordonnée à une évaluation des connaissances et des pratiques professionnelles dont les conditions seraient fixées par décret en Conseil d’Etat, ce qui améliorerait la qualité de l’expertise.

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2) Les points de refus motivés par la préoccupation des patients

Pour ce qui est des points ayant fait l’objet d’un refus de ma part et ne figurant pas comme unanimement approuvés pour cette raison dans le rapport de la mission, je citerai l’allongement de huit à quinze jours du délai de communication (de droit commun) du dossier patient et l’exclusion de l’indemnisation des infections nosocomiales pouvant être considérées comme irrésistibles.

Mon refus de l’allongement de huit à quinze jours du délai de communication (de droit commun) du dossier patient

Mon opposition a été motivée par les raisons suivantes
En l’état les dossiers apparaissent pour une majorité d’entre eux communiqués dans le délai légal de huit jours. Allonger le délai pourrait revenir à faire baisser le délai moyen actuellement constaté alors même que ce délai paraît s’allonger en fonction de l’ancienneté des soins, de la complexité du dossier et de l’organisation adoptée (ou non) par l’établissement de santé pour répondre aux demandes des patients.

Une évaluation concrète des conditions de traitement des demandes, l’établissement de bonnes pratiques d’organisation et le développement des techniques nouvelles de conservation et de standardisation des dossiers sont de nature à améliorer le délai.

Dans ces conditions il apparaît prioritaire de faire évoluer les pratiques avant d’envisager que le délai légal ne soit allongé.

Mon refus de l’exclusion de l’indemnisation des infections nosocomiales pouvant être considérées comme irrésistibles

Mon opposition a été motivée par les raisons suivantes

Exclure du champ de l’indemnisation les infections « irrésistibles » c’est réouvrir la discussion sur le champ d’application de la loi de 2002 alors même qu’aujourd’hui la distinction n’est pas faite par la loi.

Il existe alors un risque que ne soit exclue l’indemnisation de certaines infections dites endogènes où le malade est contaminé par ses propres germes et où l’asepsie apparaît moins maîtrisable. Pourtant c’est bien l’acte diagnostique ou thérapeutique, par exemple invasif, qui fera évoluer ou rendra dangereux un tel germe.
C’est sur cette base que les juridictions judiciaires ont maintenu un champ large à l’indemnisation.
Par ailleurs une telle limitation tend à circonscrire l’infection nosocomiale alors même qu’en matière médicale il doit être tenu compte des progrès scientifiques rapides et constants.

Dans les deux cas, notre opposition (celle de ma collègue socialiste et la mienne) a été reprise dans le rapport.
Nous envisageons de déposer une proposition de loi allant dans le sens de ces préconisations et de nos observations au texte de la mission.

NB : Vous pouvez consulter le texte du rapport de la mission à l’adresse électronique mentionnée plus haut et le texte de la loi du 4 mars 2002 en le téléchargeant à partir de cette page (plus bas).