« J’ai voté la sortie du régime d’exception de la crise sanitaire, défendu l’établissement d’une expertise publique indépendante pour éclairer les pouvoirs publics, soutenu des amendements en vue d’obtenir des mesures en faveur des écoles et de la gratuité des tests » par Marietta KARAMANLI

Ce projet de loi est intervenu avant que ne s’éteigne le cadre juridique de l’état d’urgence sanitaire la fin de ce régime étant prévu au 31 juillet 2022 il était en vigueur depuis Ie 23 mars 2020 et permettait de prendre des mesures de restriction. Si j’ai été favorable depuis le début à la prise de mesures adaptées j’ai regretté le régime adopté.

J’ai toujours estimé que les textes existants auraient pu être adaptés, le parlement mieux contrôler, l’expertise publique organisée de façon plus transparente et mieux partagée

J’ai voté ce texte car le régime d’exception a été abrogé, les données personnelles utilisées mieux protégées et les éventuelles futures mesures visant à limiter l’épidémie plus limitées. Je regrette que les mesures proposées par l’Assemblée Nationale en vue d’assurer la collégialité, l indépendance des autorités et le meilleur contrôle n’aient pas été plus discutées.

Par ailleurs les propositions visant à la gratuité des tests pour les personnes non vaccinées ou le lancement par d’une campagne de sensibilisation ou port du masque et d’une campagne d’équipement des bâtiments publics (écoles, etc.) en purificateurs d’air, n’aient pas été adoptées.

Lors de la discussion parlementaire j’ai signé en première auteure et co signataire trente amendements.

Mon intervention en commission et mes questions au nouveau ministre de la santé

Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, Mardi 5 juillet 2022, Séance de 15 heures 30, Compte rendu n° 2

Mme Marietta Karamanli (SOC). Le groupe Socialistes et apparentés vous souhaite la bienvenue, monsieur le ministre. La question du régime juridique applicable en temps de crise sanitaire nous occupe sérieusement depuis deux ans et demi. Dès le début de la pandémie, nous avions insisté sur le fait que l’article L. 3131‑1 du code de la santé publique suffisait amplement à gérer la situation en cas de reprise de l’épidémie. Nous avons débattu de multiples fois ici du régime juridique de l’état d’urgence sanitaire consacré par la loi du 23 mars 2020. Ce régime autorise le Gouvernement à prendre des mesures attentatoires aux libertés fondamentales, individuelles et publiques : confiner la population, placer en quarantaine des personnes potentiellement affectées par la covid‑19, isoler celles dont la contamination a été avérée, fermer des lieux recevant du public, limiter voire interdire des rassemblements sur la voie publique, réquisitionner certains biens et services, prendre toute mesure permettant la mise à disposition de médicaments, bloquer le prix de certains produits, comme ce fut le cas pour les masques chirurgicaux.

Le régime juridique de gestion de la sortie de crise créé par la loi du 31 mai 2021 autorise aussi le Gouvernement à prendre des mesures permettant de vivre avec le virus. L’article L. 3131‑1 dispose que le ministre chargé de la santé peut, par arrêté motivé, prescrire dans l’intérêt de la santé publique toute mesure proportionnée aux risques courus et appropriée aux circonstances de temps et de lieu. Le droit commun semble donc équilibré et susceptible de pourvoir parfaitement aux nécessités sanitaires, en cas de reprise de l’épidémie. C’est au demeurant la finalité explicitement prévue par cet article, qui dispose que « le ministre peut également prendre de telles mesures après la fin de l’état d’urgence sanitaire […] afin d’assurer la disparition durable de la situation de crise sanitaire ».

Lorsque la situation l’exige, la proclamation de l’état d’urgence sanitaire n’est évidemment pas discutable. C’est la raison pour laquelle nous ne nous y sommes point opposés, ni au moment de la création de l’état d’urgence sanitaire en mars, ni lors de sa prorogation en mai. À l’inverse, lorsque la situation ne l’exige plus de manière évidente, il est impératif de sortir de cet état d’exception afin de retrouver le droit commun.

Le projet de loi vise à proroger uniquement le système d’information de pilotage de l’épidémie et le passe sanitaire pour les voyages ayant comme point de départ ou d’arrivée la France, et ce sans créer un nouveau régime de droit commun, qui serait sous le contrôle resserré du Parlement et sous un éclairage scientifique. Et, bien qu’il s’agisse de prolonger des dispositions importantes, nous ne disposons ni d’une évaluation des mesures prises, ni d’un bilan épidémiologique. Par ailleurs, si son objet est certes restreint, ce projet ne permet nullement d’améliorer la transparence et de mieux associer le Parlement aux mesures à venir. C’est un choix regrettable.

Quelle est la stratégie vaccinale du Gouvernement ? Nous pouvons lire ou entendre beaucoup de choses dans la presse et les médias, notamment en matière de conseils à la population, mais nous n’avons aucune information émanant directement du Gouvernement.

Enfin, des personnels médicaux et soignants ont refusé des obligations associées à la phase aiguë de l’épidémie. Y a-t-il un bilan les concernant ? Quelles sont les intentions du Gouvernement à leur sujet ?

XVIe législature, Session extraordinaire de 2021-2022, Séance du lundi 11 juillet 2022,

 Veille et sécurité sanitaire en matière de lutte contre la covid-19, Discussion, après engagement de la procédure accélérée, d’un projet de loi

Mme Caroline Abadie, rapporteure.

…Enfin, je souhaite insister sur le fait que l’article en question ne fixe que le cadre juridique de la mesure : ses modalités d’application continueront d’être adaptées, de manière proportionnée, à l’évolution de la situation sanitaire, et elles feront l’objet d’un contrôle approfondi de la part du Parlement.

En cohérence avec le compromis trouvé à l’article 1er, la commission a adopté un second amendement de Dino Cinieri pour ramener du 31 mars au 31 janvier 2023 la date de prorogation du certificat sanitaire. Nous avons également adopté, à l’initiative de Philippe Gosselin et de Marietta Karamanli, un dispositif d’information renforcé du Parlement pendant cette période. Les rapports prévus aux articles 3 et 4 seront utiles pour dresser le bilan des mesures prises depuis le début de l’épidémie et pour envisager la définition d’un cadre durable en matière de réponse aux menaces, aux crises et aux catastrophes sanitaires. Ils viendront prolonger de manière bienvenue les réflexions déjà menées par la commission des lois à l’initiative de Philippe Gosselin et du président de notre commission, Sacha Houlié.

Plus de deux ans après le début de la crise sanitaire, nous pouvons nous réjouir que les enjeux relatifs à sa gestion soient désormais largement dépassionnés. Le présent projet de loi l’illustre, même si je ne nie pas que des divergences de fond subsistent : c’est tout à fait normal et même parfaitement sain dans un cadre démocratique. Je me réjouis que nous puissions en débattre une nouvelle fois aujourd’hui, ainsi que nous le faisons de manière très régulière depuis le mois de mars 2020.

Nous pouvons également nous satisfaire que ce projet de loi inaugure une nouvelle manière de légiférer – celle souhaitée par les Français –, fondée sur la recherche du compromis ; nous nous y sommes employés dès nos travaux en commission des lois. Parmi les amendements déposés ce soir, j’ai identifié d’autres points de convergence que nous pourrons étudier durant l’examen du texte. D’abord, le dispositif prévu à l’article 2 pourra être renforcé par la proposition du groupe Les Républicains, qui vise à consulter les exécutifs locaux avant de l’instaurer ; ensuite, la nature du débat qui suivra la remise des rapports pourra être précisée dans le texte conformément à la proposition formulée par le groupe Socialistes et apparentés.

M. le président.

La parole est à Mme Marietta Karamanli.

Mme Marietta Karamanli (SOC).

Ayant suivi depuis deux ans et demi les débats liés aux projets de loi relatifs à la crise sanitaire, je peux vous dire qu’il n’y a pas de raison de nous exciter ou de nous énerver aujourd’hui. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

M. Erwan Balanant.

Bravo !

Mme Marietta Karamanli.

Attendez, cher monsieur Balanant !

Cependant, plus que jamais, il est nécessaire de nous écouter et de nous respecter. Nous l’avons dit en commission des lois, nous ne sommes pas d’accord car nous considérons que ce texte n’apporte rien de plus. Il ne tient pas compte de toutes les demandes que nous avons formulées depuis deux ans et demi. En effet, nous avons fait des propositions, demandé des évaluations, souhaité par exemple que le Parlement soit systématiquement associé et que le Conseil scientifique vienne rendre compte de ses travaux devant nous. Or nous n’avons rien obtenu de tout cela.

La discussion d’aujourd’hui est une occasion pour nous d’avancer. Je le répète car le débat n’est pas terminé. Après le vote – dont j’ignore l’issue – sur cette motion, il faudra, si nous voulons avancer, que vous teniez compte de ce que nous venons de dire. Nous devons sortir par le haut. Le groupe Socialistes et apparentés soutiendra donc cette motion. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et LFI-NUPES.)

Mme Marietta Karamanli.

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Tout d’abord, je souhaite la bienvenue à tous mes collègues nouvellement élus et présents à cette séance pour examiner un texte qui, à certains d’entre nous, rappelle un passé proche.

M. Philippe Gosselin.

Très proche !

Mme Marietta Karamanli.

Ce projet de loi intervient dans un contexte particulier, celui d’une pandémie qui dure et se renouvelle, et d’une flambée des cas de contamination dans le cadre de ce que l’on nomme déjà la septième vague de la covid. Ces rappels ne sont pas uniquement une figure de style : voilà deux ans et demi que nous discutons du régime juridique applicable en matière de crise sanitaire, de la sortie de ce régime et de sa prolongation. Je l’ai dit en commission, depuis mars 2020, nous avons débattu successivement du régime juridique de l’état d’urgence sanitaire, créé par la loi du 23 mars 2020, puis du régime juridique de gestion de la sortie de crise sanitaire, créé par la loi du 31 mai 2021. Ces deux régimes juridiques s’éteindront en l’absence de prorogation le 31 juillet 2022 : le Gouvernement ne pourra plus prendre une série de mesures, et le comité de scientifiques prévu à l’article L. 3131-19 du code de la santé s’éteindra lui aussi. Seul demeurera le régime juridique qui permet au ministre de la santé de prendre des mesures face aux menaces sanitaires.

Le présent projet de loi vise à proroger, d’une part, le système d’information et de pilotage de l’épidémie et, d’autre part, un mécanisme de passe sanitaire pour les voyages ayant comme point de départ ou d’arrivée la France, sans créer un nouveau régime de droit commun qui serait sous le contrôle resserré du Parlement et bénéficierait d’un éclairage scientifique. Alors que le texte vise à établir une prolongation de dispositions importantes, nous ne disposons ni d’une évaluation des mesures prises et encore applicables ni d’un bilan épidémiologique. Le Gouvernement ne profite pas non plus de ce texte à l’objet resserré et aux mesures limitées pour améliorer la transparence des dispositifs de sécurité sanitaire ou assurer une meilleure association de la représentation nationale à des décisions ayant pour effet indirect mais réel de limiter nos droits et libertés fondamentaux.

La position des députés du groupe Socialistes et apparentés consiste à faire preuve de vigilance vis-à-vis à la fois du texte et du Gouvernement.

S’agissant du Gouvernement, nous avons noté l’attachement affiché de la Première ministre, cheffe du Gouvernement, à la concertation et au compromis en matière d’évolution de la politique de santé – dont la sécurité sanitaire fait partie. Pourtant, les mesures prises dans ce domaine depuis de nombreux mois n’avaient pas tenu compte des propositions alternatives. L’objectif, à savoir la veille et la sécurité sanitaires, ne doit pas nous conduire à abandonner l’idée de mécanismes de contrôle effectifs, pouvant être réactivés en période de crise. C’est le sens des amendements que nous avons déposés et que nous défendrons tout à l’heure dans l’hémicycle. La commission des lois a d’ores et déjà revu à la baisse le délai de fin de recours à ces nouvelles mesures. Elle a aussi posé le principe de l’information de la représentation nationale sur la base d’un rapport présenté devant l’Assemblée, assorti d’un avis d’experts.

Nous avons fait plusieurs autres propositions d’amélioration. Ainsi, toute décision instituant un mécanisme de contrôle sanitaire et limitant, même de façon sélective, les droits de nos concitoyens doit faire l’objet d’une expertise publique préalable. C’est ainsi que nous proposons de conditionner le recours à un passe sanitaire pour les déplacements internationaux à un avis d’experts. Nous demandons de définir dès aujourd’hui le cadre du comité de scientifiques qui aura pour tâche non seulement de conseiller et de délibérer de façon collégiale et contradictoire, mais aussi de dialoguer avec le Parlement. Monsieur le ministre, lors de votre audition, vous avez renvoyé la création de cette nouvelle institution à un décret, ce qui donne au pouvoir exécutif le droit de créer un tel organisme sans que le Parlement n’exerce sa compétence. Cela n’est pas opportun si on veut renforcer la confiance de nos concitoyens ; cela n’est pas acceptable dans le contexte politique présent où une majorité de nos concitoyens a souhaité un meilleur équilibre entre les pouvoirs exécutif et législatif.

Par ailleurs, le passe sanitaire ne doit être rendu possible qu’en fonction d’une gravité objectivée de la situation, sur un territoire précisément déterminé.

Depuis 2020, nous ne cessons d’exiger un meilleur contrôle du Parlement sur les décisions de sécurité sanitaire, qui doivent être prises sur avis d’une expertise collégiale, contradictoire et transparente. Nous sommes constructifs et soumettons à la discussion plusieurs pistes d’amélioration. Cependant, nous resterons vigilants : si nos propositions ne sont pas retenues, le groupe Socialistes et apparentés ne votera pas le texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

M. François Braun, ministre.

Monsieur Gosselin, vous avez évoqué les textes concernant la vigilance sanitaire, mais aussi le contrôle de la CNIL : je rappellerai seulement que celle-ci a établi début juillet, dans son cinquième avis adressé au Parlement sur les conditions de mise en œuvre des dispositifs contre la covid-19, que le Gouvernement avait tenu compte de ses avis précédents.

Monsieur Mandon, vous avez raison : la vigilance reste de mise. Croire, comme certains, que l’on supprimerait la fièvre en cassant le thermomètre constitue à la fois une erreur médicale et une faute de logique.

Madame Karamanli, le Gouvernement sera favorable à votre amendement concernant l’évaluation des mesures prévues, avec au mois d’octobre un rapport appuyé sur des avis d’experts. Vous établissez le cadre d’un futur comité de scientifiques : précisément, le Conseil scientifique mettra fin à ses activités le 31 juillet. Nous aurons l’occasion d’y revenir lors de la discussion des amendements.

Monsieur Pradal, protéger la Corse et les outre-mer est bien l’un des objectifs du projet de loi et il faut donc le prendre en compte.