Durant l’été 2022, présidente sortante du groupe d’amitié Franco Hellénique à l’Assemblée Nationale, je me rendue à l’invitation des autorités portuaires dans les villes et ports de Thessalonique et d’Alexandropoulis en GRECE.
Je devais initialement visiter le port d’Alexandropoulis en compagnie du sénateur américain Léonidas RAPTAKIS (de l’unité fédérée de Rhode Islandhttps://www.rilegislature.gov/senators/Raptakis/Pages/Biography.aspx ) qui n’a pu, pour des raisons d’emploi du temps, m’y accompagner.
Comme le soulignent plusieurs rapports relatifs à la sécurité des Etats-Unis cette région, le Nord de la Grèce est devenue une région stratégique pour la sécurité en Europe et celle des Etats-Unis
Cette situation est née de l’évolution des positions turques qui cherchent à assurer un leadership en méditerranée orientale et de l’invasion par la fédération de Russie de l’Ukraine avec la volonté de reconstituer un glacis sur sa partie occidentale.
La crise énergétique renforce le défi que constitue la question des voies de transport.
J’ai visité le port de Thessalonique en compagnie du député Anastasiadis SAVVAS (élu de la Nouvelle démocratie – ND)
J ’ai été aussi reçue à Alexandropoulis par le député Anastasios DIMOSCHAKIS (élu lui aussi de la Nouvelle Démocratie) avec qui j’ai eu plusieurs échanges sur la sécurité aux frontières grecques avec la Turquie et le développement économique de la région.
Le port de THESSALONIQUE
Historiquement, le port et les chemins de fer de la région ont été construits avec l’aide de l’Etat français. Ce point est rappelé avec insistance non seulement par goût de l’histoire mais aussi par souci de justifier et de légitimer une nouvelle relation.
En l’état l’orientation des autorités nationales et locales de Thessalonique est d’agir avec les autres ports du Nord mais aussi avec ceux des îles de la mer Egée. Il s’agit de développer les relations commerciales et touristiques avec la création de nouvelles lignes comme par exemple avec les Sporades du Nord.
L’idée est d’assurer un débouché logistique et de transports des marchandises depuis l’Europe du Nord sans forcément passer par les ports de la méditerranée occidentale. En effet un port sans chemins de fer n’est rien.
Carte des principales voies ferroviaires dans le Sud Est de l’Europe
La prise de propriété par les chemins de fer italiens du réseau grec n’a donné lieu deux ans après le transfert de propriété à aucun développement, aucune rénovation ni consolidation du réseau grec ( les chemins de fer italiens, Ferrovie Italiane, ont racheté l’opérateur ferroviaire grec TRAINOSE, pour moins de 100 millions d’euros).
Le transport des céréales mais aussi de biens de consommation comme les voitures faites en Europe nécessite un acheminement par voie ferroviaire et non par route (capacités, énergie…).
La création de « ports secs » suppose la connexion et l’arrivée par train des marchandises. En l’état l’absence de volonté italienne se traduit par un non-développement a minima.
L’absence de réalisation d’engagement par l’exploitant italien pourrait être compensée par une action volontariste de l’Union européenne dans le cadre de sa stratégie du rail.
A été présenté le projet d’extension de la jetée 6, qui renforce la position du port de Thessalonique dans l’industrie portuaire mondiale et le secteur de la logistique, et les capacités des deux nouvelles grues STS (Ship to Shore), d’une valeur totale de 15,7 millions d’euros, récemment reçues par ThPA S.A. Ont été évoqués aussi les développements dans les secteurs des croisières et des ferries et leur importance pour la société et l’économie de Thessalonique et de la région au sens large, notant que le port de Thessalonique redeviendra en 2021 un « port d’attache », c’est-à-dire un port pour l’embarquement et le débarquement des passagers à bord des navires de croisière et qu’il sera relié aux ferries.
Le port d’ALEXANDROPOULIS
Il est dans une situation un peu symétrique. Situé à une centaine de kilomètres de la frontière Turque et à trois cents kilomètres d’Istanbul il constitue une voie d’accès par transports fluvial, maritime et ferroviaire de l’Europe centrale.
Sur le plan de la défense, la valeur d’Alexandroupolis est en hausse alors que l’OTAN renforce sa force de réaction rapide et sa présence le long des lignes de front de plus en plus étroites de l’alliance dans les Balkans, y compris en Bulgarie et en Roumanie. Le port grec évite des goulets d’étranglement au coeur du continent qui ont longtemps mis en péril les plans de déplacement rapide des troupes et de l’équipement dans le sud-est de l’Europe et les y entretenir. Par ces mêmes éléments, Alexandroupolis se trouve à cheval l’alternative la plus directe vers le sud du couloir de la mer Noire, dont l’accès est contrôlé par Russie et Turquie, pour avoir acheminé les exportations alimentaires vitales de l’Ukraine vers les marchés de l’autre côté de la Méditerranée et du canal de Suez. ( source « Port in a Storm: Enhancing U.S.-Greece Cooperation at Alexandroupolis). Traduction par nos soins
Une partie des productions agricoles venant d’Ukraine pourrait y être acheminée en 24 heures contre trois jours en empruntant la voie orientale comme aujourd’hui.
Cet atout commercial est un enjeu stratégique pour contrer les conditions et embargos posés par la Turquie et la Russie sur la mer noire.
L’existence de la voie ferroviaire qui va vers Thessalonique en provenance de la Bulgarie est à la fois un leg du passé ( voir l’Orient-Express) mais aussi une opportunité pour conforter cet axe notamment en y entreprenant des travaux d’électrification.
Les Etats-Unis mènent dans cette partie de l’Europe une forte mobilisation de leurs réseaux et de leurs forces commerciales pour s’y implanter et sécuriser leur position en Europe.
Il convient, ici, d’être attentif à cet enjeu et prévenir un partenariat exclusif.
Les cartes du transport actuel (types de marchandises, tonnages, exploitants des chaînes logistiques…) montre qu’est menée une réflexion américaine pour augmenter la place des ports du Nord de la Grèce dans l’acheminement des marchandises vers l’Afrique mais aussi vers l’Amérique, en laissant de côté la façade atlantique.
Il est à noter que d’ores et déjà les voies routières, les ports secs au long de l’autoroute des Estuaires sont dans cette perspective quasi absents comme ils le sont déjà aujourd’hui.
Dans ces conditions ma visite a constitué un utile échanges, l’opportunité pour les autorités portuaires mais aussi publiques et politiques de faire état d’une demande de réflexion commune, d’échanges réguliers, d’une cartographie des liens économiques existants ou possiblement à développer.
Un schéma des liaisons et des voies économiques pourrait être utilement réalisé et prolongé d’un point de vue plus stratégique voire militaire.
J’ai proposé d’écrire aux entreprises ferroviaires françaises pour leur faire part des opportunités qui pourraient naître d’une réflexion à l’international prenant en compte les éléments rappelés ici.
Cette visite m’a permis de défendre quelques semaines plus tard au sein des instances de coordination des parlements nationaux des Etats membres de l’Union européenne un point de vue documenté, circonstancié et je l’espère convaincant sur la nécessité de nous préserver de toute dépendance face à des puissances extérieures en préparant l’avenir
Marietta KARAMANLI
Documents à l’appui
Dépêche
• https://maritime-executive.com/corporate/deputy-of-the-french-national-assembly-visits-thpa-s-a
• https://www.hellenicshippingnews.com/visit-of-the-deputy-of-the-french-national-assembly-marietta-karamanli-to-thpa-s-a/