A l’initiative de Marietta KARAMANLI, la commission des affaires européennes de l’Assemblée Nationale se prononce en faveur d’une plus grande et meilleure collecte des déchets d’équipements électriques et électroniques dans l’Union

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Après vous avoir présenté une première communication sur la proposition de directive relative aux déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) en octobre dernier, j’ai fait une nouvelle communication devant la commission des affaires européennes sur le projet de directive de l’union Européenne visant à renforcer la collecte et le recyclage de ces déchets dans l’Union européenne.
Après avoir rappelé la nécessité de développer l’éco-conception des produits de façon à permettre le réemploi et le recyclage des produits et ainsi limiter l’impact sur l’environnement, j’ai proposé plusieurs orientations.
La Commission s’est ainsi prononcée en faveur de l’objectif de plus de collecte et de recyclage, d’une définition large du champ d’application, d’une affectation de moyens suffisants pour parvenir à l’objectif fixé, d’une définition nationale du producteur pour permettre de réaliser rapidement un maximum de collecte, d’un traitement du problème de l’exportation sauvage de déchets vers des pays émergents, enfin du maintien de l’affichage de l’écoparticipation.
Je serai évidemment attentive aux orientations prises par la version finale de la directive.


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Commission des affaires européennes, mardi 11 janvier
17 h 30, Compte rendu n° 182, Présidence de M. Pierre Lequiller Président

I. Communication de Mme Marietta Karamanli sur les déchets électriques (document E 4191)

Mme Marietta Karamanli, rapporteure.

Après vous avoir présenté une première communication sur la proposition de directive relative aux déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) en octobre dernier, j’ai souhaité procéder à des auditions complémentaires.

Le Parlement européen devant se prononcer en première lecture début février sur la proposition, il m’a paru opportun de revenir sur cette question aujourd’hui. Au Conseil, un accord politique est envisagé sous présidence hongroise.

La directive de 2003 actuellement en vigueur vise à prévenir la production de déchets d’équipements électriques et électroniques et organiser la collecte et le recyclage de façon spécifique. Elle pose le principe de la responsabilité du producteur de l’équipement, par exception au principe général de responsabilité du détenteur du déchet. La Commission européenne propose la refonte de cette directive afin de remédier aux insuffisances juridiques, techniques et administratives, responsables selon elle de résultats insuffisants en matière de collecte et de recyclage des DEEE dans l’Union européenne.

Plusieurs difficultés, que j’avais évoquées dans ma communication d’octobre dernier, concernent :

 les déchets couverts par le champ d’application : le Conseil est divisé, certains Etats, dont la France, étant favorables à un champ d’application ouvert, tous les déchets sauf ceux expressément exclus , d’autres préférant un champ fermé, la liste des déchets étant alors annexée à la proposition.

 les objectifs de collecte : la Commission propose de porter ce taux d’ici 2016 à 65 % des équipements mis sur le marché au cours des trois précédentes années. Une majorité d’Etats membres juge l’objectif irréaliste, ce qui a conduit la présidence belge à proposer une approche par étapes. La France est favorable à l’objectif de 65 %, tout en soulignant que des moyens supplémentaires devraient être disponibles pour les producteurs.

La proposition vise également à relever de 5 % les taux de recyclage et de valorisation de la directive actuelle. Afin d’encourager le réemploi, des objectifs de recyclage associés à la réutilisation sont fixés.

Je tiens à cet égard à souligner, et il s’agit d’une remarque qui s’applique à l’ensemble de la problématique des déchets, que l’éco-conception des produits doit être une priorité, de façon à permettre le réemploi et le recyclage et à limiter l’impact sur l’environnement.

Sur la définition du producteur, la Commission européenne prévoyait d’adopter une définition communautaire, c’est-à-dire de prendre en compte le premier « metteur au marché » au niveau de l’Union européenne alors qu’actuellement une définition nationale s’applique : le producteur est le premier « metteur au marché » sur le territoire national, producteur ou importateur. Le Conseil s’y est opposé, en raison des difficultés de contrôle que cela entraînerait. En outre, la définition du producteur au niveau européen pourrait créer un décalage entre les sommes perçues dans les Etats membres, les objectifs de collecte et les besoins de financement effectifs pour le traitement des DEEE sur le territoire national, certains Etats pouvant alors faire le choix de pratiquer un « dumping » à l’éco-participation, ce qui menacerait la réalisation des objectifs de collecte européens.

La Commission proposait parallèlement de rendre les registres nationaux interopérables, afin de permettre la surveillance des activités des producteurs et des quantités de déchets sur l’ensemble du territoire de l’Union mais, compte tenu de la situation actuelle, les Etats membres ont marqué leur préférence pour des registres nationaux par crainte d’une perte de fiabilité des données.

Le Parlement européen doit se prononcer en première lecture la première semaine de février. La commission de l’environnement a adopté en juin 2010 plusieurs amendements proposés par le rapporteur, M. Karl-Heinz Florenz. Les députés européens ont notamment proposé de porter l’objectif de collecte d’ici 2016 à 85 %. Ils se sont prononcés en faveur d’une définition du producteur au niveau de l’Union européenne.

D’autre part, le rapport de la commission de l’environnement du Parlement européen prévoit que les quantités de déchets collectées seront déclarées par tous les acteurs de la collecte. Cela signifie que les déchets collectés par les ferrailleurs seraient pris en compte dans les objectifs généraux, alors que leurs activités ne répondent pas aux exigences de dépollution. Plus globalement, il convient de prévenir les fuites de déchets hors des filières agréées et on peut regretter que cette question ne soit pas abordée dans la proposition de directive, notamment pour empêcher que ces déchets ne soient ensuite exportés clandestinement vers les pays en développement, alors même que l’Union européenne a approuvé l’interdiction de l’exportation de déchets dangereux vers ces pays, dans le cadre de la convention de Bâle.

Parmi les dispositions adoptées par la commission de l’environnement du Parlement européen, l’une me paraît poser problème : il s’agit de la suppression de la « contribution visible ». La proposition de directive prévoit de maintenir la possibilité pour les Etats membres d’afficher séparément du prix des produits les coûts de collecte et de recyclage des déchets électriques et électroniques, qui était prévue à titre transitoire dans la directive de 2003. Cette possibilité d’affichage avait été justifiée dans la directive de 2003 par l’existence d’un stock d’équipements dits « historiques », mis sur le marché avant l’entrée en vigueur de la réglementation. Huit Etats membres ont utilisé cette possibilité. En France, la contribution visible est appliquée depuis novembre 2006. Elle répercute intégralement l’éco-contribution versée par les producteurs à l’éco-organisme auquel ils ont choisi d’adhérer, et qui a la charge de l’enlèvement et du traitement des déchets d’équipements électriques et électroniques. Le montant de l’éco-contribution est fixé par les éco-organismes.

Quels sont les avantages de ce système ? Tout d’abord la contribution visible permet d’informer les consommateurs sur l’existence d’une filière de collecte et de recyclage des DEEE et sur les coûts de fin de vie du produit qu’ils achètent.

De plus, elle constitue une base pour le financement de la filière. Le Sénat a adopté un amendement à la proposition de loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit tendant à maintenir la contribution visible jusqu’en 2013 pour tous les équipements, dans l’attente de l’adoption de la directive.

Mme Odile Saugues.

Le traitement des déchets est un sujet très important, il y a urgence à agir. Mais de quelle façon appliquer ce futur système aux pays dans lesquels la collecte n’est même pas assurée de manière régulière €“ je pense au Sud de l’Italie, où les liens entre ces circuits et la mafia sont connus €“ et qui sont le point de départ de « fuite » de ces déchets vers des pays en voie de développement ? Cette directive est certainement nécessaire, mais comment assurer son application dans des pays ne pratiquement pas correctement la collecte ?

Mme Marietta Karamanli, rapporteure.

Je n’ai pas de réponse directe à cette question. Les objectifs européens sont ambitieux mais il convient d’en assurer le contrôle effectif. C’est tout le problème des filières clandestines en matière de déchets. Des pays deviennent de véritables « poubelles ». Il faut assurer le recyclage et le traitement mais aussi agir sur la conception même des produits, afin d’avoir des produits moins polluants.

M. Pierre Forgues.

Pourquoi la commission de l’environnement du Parlement européen préconise-t-elle la suppression de l’affichage du coût du recyclage ? Cette visibilité du coût a une vertu pédagogique indéniable ! S’agissant du problème de la définition du producteur au niveau européen ou national, quelle serait la différence ? Le « producteur » n’est-il pas nécessairement celui qui fabrique le produit ? Quant au champ d’application, je suis favorable à ce qu’il soit ouvert. Il faut éviter de baser le système sur des listes. J’observe d’ailleurs que ces questions, au-delà des déchets électriques et électroniques, concernent tous les secteurs de l’industrie. J’en prends pour exemple la question, qui correspond à des préoccupations concrètes pour ma circonscription, de la déconstruction des avions, qu’il est très difficile de financer et de mener dans les conditions les plus « écologiques » possible.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure.

La notion de producteur désigne au sens de la directive le « metteur au marché », qu’il s’agisse du producteur ou de l’importateur. S’agissant de l’affichage du coût, les habitudes sont variables selon les pays, par exemple il n’est pas pratiqué en Allemagne.

M. Yves Bur.

Le paragraphe 6 des propositions de conclusions constitue-t-il simplement un vÅ“u, ou traduit-il une action déjà engagée au niveau européen ? C’est bien en amont qu’il faut favoriser le recyclage.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure.

La directive relative aux déchets place la prévention au premier rang des priorités, et fait référence à ce titre à la conception écologique des produits. Il faut vraiment insister sur la prise en compte de ces considérations d’éco-conception au moment de la fabrication des produits, afin de réaliser des économies importantes au moment de leur recyclage.

M. Bernard Deflesselles.

La révision de la directive de 2003 apparaît nécessaire à tous. Ne pourrait-on être plus « directifs » dans la formulation du paragraphe 4 des conclusions, en exprimant le regret que le problème de la fuite des déchets ne soit pas pris en compte et en demandant qu’il le soit ? D’autre part, la rapporteure indique que la France, favorable à l’objectif de 65 %, souhaite que des « moyens supplémentaires » soient accordés dans ce but aux producteurs ; pourriez-vous préciser cet élément ?

Mme Marietta Karamanli, rapporteure.

La France et d’autres pays réclament des moyens supplémentaires pour aider les producteurs. La France a proposé de créer une obligation de remise des déchets aux producteurs à partir des points de collecte. Il est nécessaire en effet d’accompagner les filières. Nous ne disposons pas à ce stade d’estimations chiffrées de ces besoins.

M. Bernard Deflesselles.

Il conviendrait en tout cas de mentionner ce point dans les conclusions.

M. Marc Laffineur.

S’agissant du point 4 des conclusions relatif à la question des fuites de déchets hors des filières agréées, en particulier parce qu’elles peuvent être liées à des exportations clandestines vers des pays en développement, y a-t-il un moyen de savoir ce que cela représente ? Il doit être très difficile de disposer d’estimations pour ces filières, les produits étant revendus illégalement.

Mme Marietta Karamanli, rapporteure.

Nombre de ferrailleurs non agréés récupèrent effectivement les déchets électriques et électroniques.

M. Pierre Forgues.

Pour un avion, dans le cas où une pièce est susceptible d’être réutilisée, elle doit d’abord être vérifiée par un contrôleur agréé par le constructeur avant sa remise sur le marché.

Puis, sur proposition de la rapporteure, la Commission a adopté les conclusions suivantes :

« La Commission,

Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) (Refonte) (COM (2008) 810 final/n° E 4191),

1. Approuve l’objectif d’amélioration du fonctionnement du système de collecte et de recyclage des déchets d’équipements électriques et électroniques de la proposition de directive ;

2. Souligne la nécessité de définir un champ d’application ouvert pour permettre la réalisation de cet objectif ;

3. Soutient l’objectif de collecte défini dans la directive mais estime nécessaire de prévoir des moyens supplémentaires pour les producteurs ;

4. Est favorable au maintien d’une définition du producteur au niveau national, afin d’éviter toute difficulté d’application, tout en soulignant que les modalités du passage à une définition au niveau de l’Union européenne devraient être préparées ;

5. Regrette que la question des fuites de déchets hors des filières agréées ne soit pas prise en compte dans la proposition de directive, en particulier parce qu’elles peuvent être liées à des exportations clandestines vers des pays en développement et demande que des dispositions soient adoptées pour remédier à ce problème ;

6. Approuve la prolongation de la possibilité d’affichage distinct du prix des produits des coûts de collecte et de recyclage des déchets électriques et électroniques, qui permet une information des consommateurs sur l’existence d’une filière spécifique et garantit son financement ;

7. Rappelle aussi la nécessité de favoriser l’éco-conception des produits et quand cela est possible la réutilisation des matériels, et ainsi économiser les matières premières et l’énergie. »