« Dotations aux collectivités locales dans le budget 2014 : un effort demandé important mais raisonnable ; des propositions pour améliorer la péréquation ; des perspectives à donner pour la fiscalité locale » par Marietta KARAMANLI

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Le 28 octobre, j’ai participé à la réunion de commission dite « élargie » réunissant la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire et la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, qui avait à examiner les crédits de la mission « Dotations aux collectivités territoriales » au titre de la loi de finances initiale pour 2014.
Responsable du suivi de la discussion de cette partie du budget au nom du groupe socialiste, j’ai fait valoir trois éléments.

 Si le projet prévoit une diminution des crédits de 1,5 milliards d’euros en 2014 et 2015 au titre de l’effort d’assainissement des finances publiques ( entre 2007 et 2012 l’endettement public de notre pays a augmenté d’environ 600 milliards) cette baisse est, en fait, moindre car le périmètre couvert n’est plus le même , elle est finalement de l’ordre de 296 millions d’euros.
Le Président sortant en 2012 avait, lui, annoncé une coupe de l’ordre de 10 milliards d’euros sur 5 ans!
Cet effort a été préalablement discuté et négocié avec les collectivités locales.
Parallèlement, les crédits des dotations de péréquation c’est à dire qui visent à mieux répartir les crédits entre différents types de collectivités et dans une même catégorie (comme les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale) ont été revus pour être plus efficaces.
J’ai, à cette occasion, proposé plusieurs amendements (sur lesquels j’aurais l’occasion de revenir dans un prochain article consacré à la discussion en séance publique des mêmes crédits) visant à améliorer l’équité entre collectivités.
Enfin j’ai demandé que les investissements aux collectivités soient préservés en réévaluant le fonds de compensation de la TVA ( la TVA payée par les collectivités pour les constructions immbilières leur est compensée) et qu’un mécanisme d’encouragement aux investissements à forte valeur ajoutée, notamment dans les domaines de la technologie et de l’innovation, via peut-être un redéploiement des dépenses fiscales, soit mis en place.
En conclusion j’ai relayé les craintes exprimées par les collectivités que les instruments fiscaux, mis en place à la suite de la suppression de la taxe professionnelle, s’ils ouvrent une possibilité d’augmenter les recettes, ne garantissent pas un niveau de ressources suffisant pour couvrir les charges contraintes des collectivités.
J’ai aussi plaidé pour une évolution de la fiscalité locale. Pour moi une telle réforme devrait être mise en oeuvre quand le retour à la croissance sera assuré et permettra de compenser certaines évolutions.
En réponse, le gouvernement, par la voix de la ministre déléguée à la décentralisation, a fait valoir son intérêt pour les propositions faites et a confirmé qu’il avait été créé un groupe de travail sur la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation, valeurs fixées en 1970.


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Assemblée nationale, commission Élargie
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

(Application de l’article 120 du Règlement)
Lundi 28 octobre 2013

La réunion de la commission élargie commence à quinze heures dix.
projet de loi de finances pour 2014, Relations avec les collectivités territoriales


Mme Valérie Rabault, présidente.

La parole est aux orateurs des groupes.

Mme Marietta Karamanli.

Trois éléments caractérisent ce projet de budget :
un effort important mais raisonné de participation des collectivités territoriales à l’assainissement des finances publiques ;

la poursuite du rééquilibrage des instruments de péréquation en vue d’une plus grande efficacité ;

la recherche d’un équilibre ponctuel au regard des évolutions en cours des différentes collectivités et de leurs ressources.

L’effort demandé aux collectivités locales

L’effort de grande ampleur demandé aux collectivités fait suite au Pacte de confiance et de responsabilité conclu entre l’État et les collectivités au mois de juillet dernier. Cet effort reste néanmoins raisonnable, pour deux motifs au moins.
Tout d’abord, la totalité des flux financiers de l’État vers les collectivités s’établira à un peu plus de 100 milliards d’euros en 2014, baissant, à périmètre constant, de seulement 296 millions d’euros. L’écart entre l’évolution de l’enveloppe normée et celle de ces flux s’explique, d’une part, par la croissance de la fiscalité transférée, qui représente 61,4 milliards d’euros en 2013, d’autre part, par une évolution dynamique des activités et des ressources des collectivités. Depuis 1981, hors impact de la décentralisation, les dépenses de fonctionnement ont été multipliées par trois en volume d’investissements et ont augmenté d’environ 65 %. Pour accompagner cet effort, les collectivités ont aussi bénéficié, depuis dix ans, de règles positives d’évolution des concours de l’État. Cet accompagnement, hors décentralisation et inflation, est estimé à environ 10 points.

Vous avez répondu, madame la ministre déléguée, aux interrogations du groupe SRC en indiquant que le relèvement du taux du FCTVA ne porterait pas atteinte à l’enveloppe normée, mais l’État ne pourrait-il pas, comme il le fait pour les entreprises, encourager plus fortement les immobilisations créatrices de forte valeur ajoutée des collectivités, notamment dans les domaines de la technologie et de l’innovation, via un mécanisme adapté, comme un redéploiement des dépenses fiscales ?

La montée en puissance et l’amélioration des mécanismes de péréquation

Autre caractéristique de ce projet de budget, la montée en puissance et l’amélioration des mécanismes de péréquation. Comme en 2013, la péréquation verticale augmentera de près de 120 millions, et les différents fonds de péréquation horizontale progresseront conformément au rythme prévu pour chacun d’eux : de 210 millions pour le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, qui sera porté à 570 millions ; de 20 millions pour le Fonds de solidarité de la région ÃŽle-de-France, qui atteindra 250 millions. Les critères de prélèvement et de reversement font l’objet d’une première révision avec notamment une meilleure prise en compte du critère du revenu par habitant, dont le poids sera porté de 20 à 25 %. De plus, le seuil de l’effort fiscal permettant d’en bénéficier va être relevé.

Si ces évolutions vont dans le sens des observations et conclusions du groupe de travail sur la péréquation mis en place au sein du groupe SRC, celui-ci préconise quelques adaptations complémentaires.
L’une consisterait à modifier, au sein du bloc communal, la répartition de la DSU, de la DSR et du FPIC afin que les deux premières profitent mieux aux collectivités qui en ont besoin.
Une autre serait d’améliorer le seuil de prélèvement des collectivités contributrices dès que celles-ci disposent d’un niveau de ressources supérieur à la moyenne, en vue de contribuer au budget des collectivités les moins favorisées.
Le Gouvernement serait-il favorable à cette double évolution, limitée mais utile ?

Une garantie de perspectives

Notre groupe demande également une garantie de perspectives articulée avec l’affirmation des compétences. Les collectivités territoriales se sont impliquées depuis longtemps en faveur de l’école, des universités et de la recherche, et elles sont reconnues aujourd’hui comme de véritables partenaires dans ces domaines.

En matière de fiscalité locale, une dotation de compensation a remédié aux pertes résultant de la suppression de la taxe professionnelle, ce qui a modifié l’amplitude de la fiscalité directe. Nombre d’élus s’inquiètent de ce que les instruments fiscaux, s’ils ouvrent une possibilité d’augmenter les recettes, ne garantissent pas un niveau de ressources suffisant pour couvrir les charges contraintes des collectivités. Le Gouvernement entend-il leur donner le pouvoir de décider plus directement des conditions d’application de certains dispositifs ? Envisage-t-il d’évaluer les mécanismes mis en place et de moderniser progressivement la fiscalité locale ? La tâche est certes difficile même sans compter les résistances au changement, et elle aura des effets potentiellement multiples. Sur ces sujets, quelles sont les perspectives ?

M. François Pupponi.

Un effort important est demandé aux collectivités territoriales, mais je salue, à l’instar de M. Goua, les décisions arrêtées par le Gouvernement en matière de péréquation, à l’issue d’un long dialogue avec le Comité des finances locales : augmentation très importante de la DSU ; maintien de la dotation de développement urbain (DDU) à hauteur de 75 millions d’euros ; montée en puissance du FPIC et du FSRIF.

Cependant, cette montée en puissance aura pour effet d’augmenter considérablement la contribution de certaines communes, voire créera des injustices, comme l’ont relevé M. Goua et Mme Karamanli. Ainsi des communes seront appelées à contribuer au FPIC alors que l’EPCI dont elles font partie aura déjà été soumis à un prélèvement au titre du FSRIF. Nous avons donc déposé des amendements visant à améliorer le dispositif et à éviter les injustices les plus criantes. Certaines modifications peuvent paraître marginales, mais elles sont importantes pour les communes concernées. Le Gouvernement est-il disposé à travailler avec nous à des améliorations du dispositif de péréquation, y compris dans les années à venir ?


Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée chargée de la décentralisation.

Je réponds aux questions de Mme Karamanli.

D’abord, je le précise à nouveau : le FCTVA n’est pas inclus dans le périmètre de l’enveloppe normée.

Ensuite, s’agissant des éventuels dispositifs qui permettraient d’encourager les investissements des collectivités territoriales en matière de recherche et d’innovation, nous examinerons cette question avec les services du ministère de l’économie et des finances, compétents en la matière. Le soutien à la recherche et à l’innovation est un objectif que nous partageons tous.

En ce qui concerne la DSU et la DSR, il est en effet possible d’aller encore plus loin en matière de péréquation. Cependant, nous ne disposons pas des simulations nécessaires et il serait imprudent de mettre en Å“uvre des mesures dont nous n’aurions pas évalué les effets au préalable. Mme Lebranchu et moi-même nous sommes engagées €“ je le répète €“ à organiser des réunions de travail avec les parlementaires, en premier lieu avec les présidents des commissions des finances, pour examiner ces questions dans le cadre de la réforme de la DGF. Nous allons mobiliser dès le début de l’année prochaine nos services sur cette réforme essentielle, afin de faire des propositions dans le cadre du PLF pour 2015.

Quant à une éventuelle modification du seuil de prélèvement au titre du FPIC, il convient là aussi de réaliser des simulations afin d’éviter des transferts de charge non maîtrisés d’une collectivité à l’autre. Nous sommes là aussi disposées à travailler sur cette question avec les parlementaires.

Enfin, pour ce qui est des éléments obsolètes de la fiscalité locale, nous avons créé un groupe de travail sur la révision des valeurs locatives des locaux d’habitation €“ qui ont été fixées en 1970. Ce groupe de travail a tenu une première réunion il y a un peu plus d’un mois. Il suivra la même méthode que celle employée pour la révision des valeurs locatives des locaux professionnels : il définira un échantillon, puis réalisera des simulations et des études. Notre souhait serait de parvenir, à partir de cette expérimentation, à étendre cette révision à l’ensemble des locaux d’habitation dès 2018. Mais mesurons bien l’ampleur d’une telle réforme : ce sont plus de 46 millions d’habitations qui seraient concernées.