Marietta KARAMANLI au Conseil de l’Europe «Lutter contre la pauvreté passe notamment par une imposition des plus riches, une politique du logement social et de nouvelles négociations internationales sur l’emploi et les salaires »

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Le 12 avril dernier lors de la session de l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe où je représente l’Assemblée Nationale Française (voir en ce sens deux de mes trois derniers articles en ligne), je suis intervenue dans le débat sur le rapport de M VOLONTE, député italien ayant pour thème « Combattre la pauvreté ». J’ai notamment insisté sur les conséquences d’une mondialisation aujourd’hui redoutée et la manifestation du développement d’un emploi précaire touchant une personne sur quatre. J’ai rappelé le creusement des inégalités et l’endettement qui en résulte pour de nombreuses familles. J’ai fait trois propositions : une imposition des plus riches, une meilleure redistribution notamment par le logement social, enfin de nouvelles négociations internationales sur le travail visant la création d’emplois et de meilleures rémunérations des salariés en s’appuyant notamment sur le développement des énergies non polluantes. J’ai fait observer que les plus riches avaient su se mobiliser pour faire passer leurs intérêts en accréditant l’idée que la concurrence et la réussite de quelque uns étaient de nature à assurer un développement économique favorable à tous€¦ce que la crise financière de 2008 a invalidité. Il nous faut de faire avoir auprès de tous les Etats la nécessité d’une lutte contre les inégalités.


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Le texte de mon intervention intégrale devant l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe

SESSION ORDINAIRE DE 2011, (Deuxième partie), COMPTE RENDU
de la treizième séance, Mardi 12 avril 2011 à 15 heures

Dans ce compte rendu:
1. Les discours prononcés en français sont reproduits in extenso.
2. Les interventions dans une autre langue sont résumées à partir de l’interprétation et sont précédées d’un astérisque.
3. Les interventions en allemand et en italien, in extenso, dans ces langues, sont distribuées séparément.
4. Les corrections doivent être adressées au bureau 1035 au plus tard 24 heures après la distribution du compte rendu.

Le sommaire de la séance se trouve à la fin du compte rendu.

La séance est ouverte à 15 heures sous la présidence de M. ÇavuÅŸoÄŸlu, Président de l’Assemblée.

8. Combattre la pauvreté

LE PRÉSIDENT*

€“ L’ordre du jour appelle la discussion du rapport sur €œCombattre la pauvret逝, présenté par M. Volontè au nom de la commission des questions sociales, de la santé et de la famille (Doc. 12555), ainsi que de l’avis présenté par Mme Ferić-Vac au nom de la commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes (Doc. 12577).

LE PRÉSIDENT*

€“ La parole est à Mme Karamanli.

Mme KARAMANLI (France)

€“ Monsieur le Président, mes chers collègues, monsieur le rapporteur, le présent rapport et ses recommandations entendent proposer à l’ensemble des Etats membres de lutter plus efficacement contre la pauvreté.

C’est un sujet important et les mesures avancées sont nombreuses, généreuses et, je dirais, consensuelles. A bien y regarder, on peut néanmoins se poser trois questions, en partie évoquées par les précédents orateurs:

Tout d’abord, pourquoi assistons-nous à cette inquiétante montée de la pauvreté en Europe ces dernières années?

Plusieurs phénomènes convergent: l’économie s’est mondialisée; des emplois ont été détruits ou délocalisés; des régulations ont été abandonnées. Malgré cela, les bénéfices attendus de la maîtrise de l’intelligence et des services sont maigres. Le chômage s’est installé et, puisqu’on ne pouvait pas mettre tout le monde au chômage, on a vu le travail précaire se développer.

Ce phénomène touche tous les pays, notamment les plus développés. Au final, près d’un quart de la population est en situation de travail précaire. Il est vrai que, dans la plupart de nos pays, on ne laisse pas tomber les gens. En France, le revenu minimum d’insertion ou la couverture maladie universelle ont, malgré leurs limites, contribué à enrayer la montée de la pauvreté, mais sans, malheureusement, l’en empêcher.

Enfin, les Etats ont connu un accroissement fort des inégalités de revenus conjugué à une croissance rapide de l’endettement des ménages. Ce phénomène est constaté dans un grand nombre de pays. Parler aujourd’hui de la pauvreté sans évoquer les causes multiples de son accroissement c’est comme chercher un remède sans avoir pu ouvertement évoquer les causes de la maladie.

Alors, pourquoi les Etats ne sont-ils pas aussi sensibles qu’ils le devraient aux questions de pauvreté?

D’une part, les plus riches et les plus mobilisés ont su faire entendre leurs voix et peser sur les gouvernements pour qu’ils prennent toutes les mesures en faveur de leurs positions.
D’autre part, les gouvernements ont été obnubilés par l’idée que le développement et la concurrence économiques justifiaient la dérégulation et le creusement des inégalités. Cette obnubilation a tourné à l’aveuglement jusqu’à la crise financière de 2008.

Enfin, j’en viens à ma troisième question: quelles mesures structurelles seraient utiles ou nécessaires pour combattre la pauvreté? J’en suggère trois.

La première est la taxation des plus riches. Une des leçons de la crise est que réduire les inégalités ne répond pas seulement à un objectif de justice sociale, c’est aussi un objectif de stabilité économique. Plusieurs économistes ont montré qu’un accroissement de la taxation des hauts revenus et du capital permettrait de réduire la prise de risque excessive dans le secteur financier.

La deuxième passe par la redistribution, notamment à travers d’objectifs ambitieux de construction de logements à loyer vraiment accessible.

La troisième, enfin, ce sont les négociations internationales sur le travail. Un meilleur combat contre le chômage et une plus juste rémunération passent probablement aujourd’hui par des procédures de négociations patronales et syndicales, encouragées par la puissance publique à un échelon international en y intégrant les énergies renouvelables.

Il est temps de rappeler aux Etats, et notamment au G20, que la réduction des inégalités de revenus et de richesse et la lutte contre la pauvreté sont des outils efficaces de stabilité économique et financière. La lutte contre la pauvreté passe par une analyse au fond du sujet et, suivant, l’adoption de solutions durables.