« Crise européenne : préserver les investissements porteurs de croissance, entendre les parlements nationaux et lutter contre la fraude fiscale entre Etats, des priorités « oubliées » à retrouver » par Marietta KARAMANLI

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Le 29 février à l’occasion du débat préalable au conseil européen, j’ai interrogé en séance publique,le ministre des affaires européennes sur la position de la France sur la croissance en Europe, la consultation du parlement Français avant toute décision européenne en matières économique et budgétaire et la lutte contre la fraude fiscale entre Etats.
Je souhaite en effet que :

 notre pays défende une stratégie qui préserve les investissements porteurs de croissance et donnent de l’espoir aux citoyens,

 le parlement Français soit clairement sollicité avant la discussion des orientations économiques et budgétaires au niveau européen,

 l’union lutte plus efficacement contre la grande fraude fiscale.
Comme je l’ai dit, l’Union devrait avoir comme les États-Unis la capacité d’obliger la Suisse et les autres paradis fiscaux à transmettre les données bancaires des fraudeurs présumés!
Le ministre m’a répondu…sur la fraude en tant qu’elle atteint un seul pays…et pas sur les moyens de lutter solidairement contre des comportements qui fragilisent tous les Etats. De plus il a « omis » de me dire quelles seraient les bases à partir desquelles notre pays entendait promouvoir la croissance et faire toute sa place aux élus nationaux.


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Assemblée nationale, XIIIe législature, Session ordinaire de 2011-2012
Compte rendu intégral, Première séance du mercredi 29 février 2012

Débat préalable au Conseil européen

M. le président.

La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour le groupe SRC.

Mme Marietta Karamanli.

Alors que l’Union européenne et la zone euro traversent une grave crise donnant lieu, à chaque épisode, à des mesures d’austérité nouvelles sans perspectives ni début de rémission, alors que le taux de chômage est le plus haut qu’ait connu la zone euro depuis sa création, ce cinquième sommet va définir les orientations qui vont ensuite être imposées aux États en déterminant la stratégie de leur politique économique.

Parallèlement, la Commission européenne élabore ce qu’elle appelle « l’examen annuel de croissance ». Ni le Parlement européen ni le Parlement français ne sont véritablement conviés à intervenir en amont pour contribuer à la définition d’une orientation de croissance au niveau européen. Nous ne savons donc pas sur quelles bases le prochain sommet fera des prévisions.

Les perspectives économiques sont pourtant sombres, même pour l’Allemagne, donnée souvent comme modèle. Ce que nous savons, c’est qu’il y a à l’évidence des contradictions entre, d’une part, la stratégie Europe 2020, censée être mise en Å“uvre par la Commission, qui fixe comme priorité l’emploi, la recherche, le changement climatique et l’innovation, et, d’autre part, les accords du Conseil européen créant un nouveau pacte de stabilité qui limite les investissements publics d’avenir en les assimilant à des dépenses inutiles.

Parallèlement au double déficit économique et démocratique, l’Union paraît très timide en ce qui concerne la fraude fiscale. Les avoirs grecs dissimulés en Suisse représenteraient 150 à 200 milliards d’euros alors que la dette publique du pays est de 300 milliards.

La Suisse propose de prélever un impôt sur cette fraude et de le verser aux États concernés mais l’Union estime que ces accords seraient illégaux. Selon nous, l’Union devrait avoir comme les États-Unis la capacité d’obliger la Suisse et les autres paradis fiscaux à transmettre les données bancaires des fraudeurs présumés.

Monsieur le ministre, je souhaite connaître la position du Gouvernement et de la France sur ces trois points.

Sur quelles bases le Conseil va-t-il travailler ?

Entendez-vous préserver les investissements publics d’avenir et la stratégie Europe 2020 ?

Entendez-vous lutter efficacement contre la fraude fiscale qui gangrène les ressources des États ?

(Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. Jean Leonetti, ministre.

Vous avez raison, la fraude fiscale est une plaie pour la Grèce. Quand on pense qu’elle équivaut à peu près au déficit annuel du pays€¦

M. Jean-Pierre Brard.

Qui sont les coupables ? Goldman Sachs et Papademos !

M. Jean Leonetti, ministre.

€¦on imagine les conséquences pour le peuple grec, qui se trouve dans la situation que nous connaissons.

Dans ce contexte, la liste noire publiée au niveau européen et renforcée par la France est l’un des moyens de la lutte globale contre les paradis fiscaux.

M. François Loncle.

C’est complètement bidon !

M. Jean Leonetti, ministre.

Il n’est pas suffisant, il en faut d’autres, parmi lesquels l’action de la Suisse vis-à-vis de l’évasion fiscale en provenance d’autre pays.

M. Jean-Pierre Brard.

Parlons des popes !

M. Jean Leonetti, ministre.

Vous le savez, la Suisse a pris attache avec la Grande-Bretagne et l’Allemagne et elle a signé avec ces deux pays des accords que nous contestons car ils ne se font pas dans la transparence et parce qu’ils ne servent qu’à amnistier pour un prix forfaitaire et global toute la fraude fiscale concernée. Ce n’est pas notre conception de la transparence et de la lutte contre la fraude fiscale. La Commission a été saisie et je suis sûr qu’elle va considérer que ces deux accords passés avec l’Allemagne et la Grande-Bretagne ne sont pas acceptables.

M. Jean-Pierre Brard.

Vous y croyez ? C’est un attrape-couillon !

M. François Loncle.

Quelle naïveté !

M. Jean Leonetti, ministre.

Voilà pourquoi il faut des experts et la troïka auprès de la Grèce : 5 milliards d’euros ont été rapatriés en Grèce à la suite de l’aide que nous apportons au peuple grec.

La Grèce a besoin d’une aide substantielle pour éviter la faillite, d’une assistance structurelle en ce qui concerne la collecte de l’impôt et la fraude fiscale, et aussi des moyens d’assurer la relance. D’ici à 2013, 16 milliards d’euros de fonds structurels vont être débloqués afin de permettre la relance pour le peuple grec.

Voyez qu’il n’y a pas que de l’austérité mais aussi de la solidarité, de la croissance et de la relance par l’intermédiaire de l’Union européenne. La lutte contre les paradis fiscaux et la fraude fiscale en Grèce fait partie des priorités européennes.

(Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)