Marietta KARAMANLI à l’occasion d’une réunion à Champagné sur les droits des femmes « Des choix qui ne peuvent être encore exercés faute de capacités réelles à le faire »

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Le 16 décembre dernier, j’ai animé une rencontre à Champagné à la salle polyvalente sur le thème des « Droits des femmes ».
Invitée par mes soins, ma collègue Catherine COUTELLE, députée et Présidente de la délégation des droits des femmes de l’Assemblée Nationale qui devait être présente n’a pu l’être.
L’organisation avait été préparée par Mme Josette Daguenet, secrétaire fédérale du PS aux droits des femmes et à la parité.
A cette occasion je suis revenue sur les plus récents débats législatifs mettant en avant la question des droits des femmes.
Parmi eux le travail partiel; les droits à la retraite ; la représentation des femmes dans les assemblées départementales et communales ; le projet de loi relatif à l’égalité femmes – hommes ; le texte de loi de lutte contre la système prostitutionnel.
Au final des échanges intéressants et utiles avec des participante et des participants curieux des problématiques abordées ou engagés au quotidien.


Les animatrices de la réunion

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La salle et ses auditrices et auditeurs

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Parmi les sujets abordés :

 le temps partiel ;

 les droits à la retraite ;

 la représentation des femmes aux élections cantonales et municipales ;

 le projet de loi relatif à l’égalité ;

 la lutte contre le système prostitutionnel.

Le travail partiel

Les questions posées ; des réponses à construire ; un cadre législatif pour progresser

Les questions posées

Les femmes représentent 48 % de la population active et occupent à 80 % des emplois à temps partiel. Le temps partiel est donc préférentiellement réservé aux femmes, raison pour laquelle nous avons particulièrement étudié l’article 8 du projet de loi.
Pourquoi le temps partiel est-il encore réservé aux femmes, en France au XXIe siècle ? Est-ce un avantage ou un inconvénient pour les femmes ? Pour répondre à ces questions, il suffit de regarder les statistiques.
Du côté des avantages, on pourrait supposer qu’un emploi à temps partiel laisse plus de temps pour les loisirs. En réalité, lorsqu’une femme passe d’un temps plein à un temps partiel, son temps de loisirs n’augmente que de deux minutes par jour, tandis que le temps qu’elle consacre aux activités domestiques augmente de trente-cinq minutes par jour !
Quant aux inconvénients, ils sont nombreux : le salaire horaire moyen des travailleurs €“ des travailleuses, à temps partiel est de deux euros inférieur à celui des travailleurs à temps plein. La moitié des salariés à temps partiel perçoivent un salaire inférieur à 800 euros par mois. Le temps partiel est surreprésenté dans les secteurs peu qualifiés et peu rémunérés €“ 68 % des aides à domicile, 79 % des employés de maison.
Le temps partiel est donc plus un facteur de précarité économique que de développement personnel, et c’est par la loi que nous devons l’encadrer efficacement.
Pourquoi le temps partiel est-il majoritairement féminin ?
Le travail des femmes est encore bien souvent considéré comme une ressource d’appoint pour les familles.
Une étude récente montre qu’un Français sur quatre pense qu’en période de crise, les femmes devraient laisser le marché du travail aux hommes.
La conception du travail féminin dans la société française est donc toujours fondée sur l’idée que le travail rémunéré est facultatif pour les femmes, puisque l’homme est censé assurer les besoins de toute la famille.
Le problème aujourd’hui est qu’un couple marié sur deux divorce et qu’une famille sur cinq est monoparentale. Plus de deux millions d’enfants en France sont élevés par des femmes seules.

Des réponses à construire

L’article 8 de la loi portant transposition de l’ANI réforme la réglementation du travail à temps partiel afin d’améliorer la situation des salariés dont la durée de travail est inférieure à un temps complet.
1 Il définit un nombre d’heures hebdomadaires minimal pour les salariés à temps partiel. Ce nouveau droit est, il est vrai, assorti de multiples moyens d’y déroger, par accord de branche et à la demande du salarié qui reste dans un rapport de subordination.
A titre personnel je regrette que les contrats à temps partiel n’aient pas fait l’objet d’une fiscalisation additionnelle au même titre que les contrats courts.
2 Par ailleurs le texte en prévoyant que la convention ou l’accord détermine le nombre maximal d’avenants pouvant être conclus, dans la limite de huit par an et par salarié, en dehors des cas de remplacement d’un salarié absent nommément désigné, marque une avancée par rapport à l’absence de limitation actuelle, dans certaines branches où l’on peut aller jusqu’à cinquante, cent, 200 avenants mais peut apparaître élevé car traduisant une imprévisibilité récurrente de la charge et des horaires de travail qui, d’une certaine manière. Il peut donc enfermer les titulaires de ces contrats dans une « trappe » de précarité.

Néanmoins de nombreux amendements prévoyant qu’il soit dérogé au texte pour autant de conventions de branche ont été refusés par les députés de la majorité.

3 Les députés ont souhaité aussi amender le texte sur la question des coupures, leur encadrement semblant indispensable ; en effet aujourd’hui un accord d’entreprise peut prévoir de déroger aux règles qui sont en vigueur en la matière, sans que rien ne soit prévu pour encadrer ces dérogations.
Ils ont souhaité aussi inclure dans le calcul de la durée légale du travail les déplacements entre différents lieux de travail sur une même journée en vue de permettre une définition du temps effectif de travail dans des secteurs particulièrement sujets à la dispersion quotidienne des heures travaillées, comme dans les services à la personne en arguant d’une part, que les déplacements entre deux lieux d’exécution de travail répondent à la définition de l’article L. 3121-1 et, d’autre part, parce qu’ils répondent également à l’exception visée par l’article L. 3121-4. Le gouvernement n’a pas accepté ces amendements mais a accepté d’y revenir dans un autre texte.

4 Les députés ont fait accepter le principe d’une évaluation avant le 1er janvier 2015 des dispositifs relatifs au temps partiel pour en mesurer l’impact réel notamment en termes d’égalité professionnelle.

Les droits à la retraite

Les inégalités existantes ; Les mesures adoptées

Les inégalités existantes

Les inégalités entre hommes et femmes constatées en matière de retraite portent sur plusieurs éléments :

  le niveau des pensions,

  l’âge de départ à la retraite qui est plus tardif pour les femmes,

  une application de la décote aussi plus fréquente pour les femmes et une plus grande représentation des femmes parmi les allocataires de l’allocation de solidarité aux personnes âgées, appelé avant 2007 minimum vieillesse.

Les mesures adoptées

1 Les périodes de congé de maternité sont, au regard des droits à la retraite, des périodes dites « assimilées », c’est-à-dire qu’elles ouvrent droit à la validation de trimestres de la même façon que si la personne avait été en activité. La réforme prévoit de mieux prendre en compte les trimestres d’interruption au titre du congé de maternité en permettant, à compter du 1er janvier 2014, de valider autant de trimestres que de périodes de 90 jours decongé de maternité. Cette mesure fera l’objet d’un décret.
2 En outre, le décret du 2 juillet 2012 avait déjà permis que soie nt aussi validés deux trimestres supplémentaires au titre de la maternité pour les femmes afin notamment, de leur permettre d’accéder au dispositif « carrières longues ». La loi sur les retraites va plus loin puisqu’elle prévoit dans son article 15 que l’ensemble des trimestres acquis au titre de la maternité seront désormais pris en compte pour bénéficier de la retraite anticipée « carrières longues » à compter du 1 er janvier 2014.
3 L’article 14 du la loi sur les retraites décide de mieux prendre en compte les carrières à temps très partiel ou à faible rémunération, en modifiant les modalités de validation d’un trimestre. Désormais, il sera possible d’acquérir un trimestre avec 150 heures rémunérées au SMIC au lieu de 200 ; en conséquence, un mois de travail rémunéré au SMIC permettra de valider un trimestre, quatre mois permettant de valider une année ; une activité rémunérée au SMIC durant toute l’année permettra de valider quatre trimestres dès que le temps de travail dépasse 11,5 heures par semaine. Néanmoins, un plafond spécifique sera instauré afin de limiter les effets d’aubaine : ne seront prises en compte pour le calcul de la durée d’assurance que les cotisations portant sur un revenu mensuel inférieur à 1,5 SMIC.
4 De plus, lorsqu’une année compte moins de quatre trimestres validés, les cotisations non utilisées pour la validation d’un trimestre pourront être reportées sur l’année suivante ou sur la précédente si ces années comptent également moins de quatre trimestres validés.
Ces deux mesures combinées sont particulièrement profitables aux assurés à bas salaire et à faible quotité de travail : elles bénéficient donc en particulier aux femmes, qui représenteraient entre 60 et 70 % des bénéficiaires d’après l’étude d’impact du projet de loi. Selon l’étude d’impact annexée au projet de loi, 15 % des salariés seraient concernés par cette mesure.

La représentation des femmes dans les assemblées départementales et communales

La parité et le droit qui la porte sont en retrait de la réalité.
Il faut, me semble t- il, distinguer trois types de parité :

 la parité d’obligation qui résulte de la loi et qui reste comme nous le verrons insuffisante mais s’améliore ;

 la parité de convenance qui donne à des hommes la possibilité de choisir une femme ; il s’agit là de la parité comme prétexte et argument d’opportunité (je peux l’illustrer d’un exemple j’ai entendu dire le Maire d’une grande ville « avoir des Maire-Adjointes ou être avec elles « ça fait bien » (expression que j’ai entendue !).

 la parité de conviction qui vise à donner toute leur place aux femmes et à reconnaître qu’elles seront les auteurs avec les hommes d’un changement dans la façon de faire de la politique.
La constitution de la Ve République pose le principe de l’égalité d’accès des femmes aux responsabilités. Son article 1 dispose en effet que « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales ».

La parité aux élections cantonales ; la parité aux élections municipales

La parité aux élections cantonales

La loi a réformé les élections cantonales. Elle prévoit que les électeurs désigneront tous les six ans, au scrutin majoritaire à deux tours, un binôme homme-femme pour les représenter au conseil départemental, futur nom du conseil général.
Ce scrutin a pour but d’amener la parité dans ces assemblées, alors qu’actuellement seulement 14% des conseillers généraux sont des femmes.
Pour ne pas modifier le nombre total de conseillers, le nombre de cantons sera divisé par deux (de 4.000 à 2.000), ce qui implique un redécoupage du ressort du ministère de l’Intérieur. La carte des cantons est restée dans son ensemble inchangée depuis 1801.

La parité aux élections municipales

Par ailleurs la loi a abaissé de 3500 à 1000 habitants le seuil au-delà duquel les conseillers municipaux seront élus au scrutin proportionnel de liste à deux tours avec donc une obligation de liste paritaire.

Le projet de loi sur l’égalité Femmes – Hommes

Des aménagements significatifs ; un effort à réaliser

1 Le projet de loi engage la réforme du complément de libre choix d’activité.
Afin d’accroître le niveau d’emploi des femmes et de favoriser le partage des responsabilités parentales, le texte réforme le congé parental. Ainsi une période du congé sera réservée au second parent. Pour les parents ayant un enfant la durée du congé parental pourra être prolongée de six mois supplémentaires dès lors qu’ils sont pris par le second parent. Les parents de deux enfants continueront à bénéficier d’un congé de trois ans à condition que le deuxième parent utilise au moins six mois. Cette réforme concernera les enfants nés ou adoptés après le 1er juillet 2014.
Le projet de loi prévoit que les entreprises de plus de 50 salariés qui ne respectent pas les dispositions de l’égalité professionnelle se verront interdire l’accès aux marchés publics.
2 Pour protéger les collaboratrices libérales enceintes et les collaborateurs libéraux qui souhaitent prendre leur congé de paternité et d’accueil de l’enfant, le texte introduit une période de suspension de contrat et de protection contre les ruptures de contrat.
3 La loi crée à titre expérimental pour une durée de deux ans, un nouveau cas de déblocage des sommes épargnées sur un compte épargne temps pour financer des prestations de service à la personne au moyen de chèque emploi service universel.
4 Un mécanisme de garantie contre les impayés de pensions alimentaires sera expérimenté dans les Caisses d’Allocations Familiales (CAF) d’une dizaine de départements. De plus, pour aider au recouvrement des pensions non versées, les CAF pourront effectuer des saisies sur les prestations familiales des mauvais payeurs.
5 Il prévoit la remise d’un rapport au Parlement sur l’harmonisation des différents types de congés familiaux existants en application de l’ANI. Les organisations signataires sont convenus de mener une réflexion portant d’une part sur une harmonisation des droits aux différents types de congés existants actuellement (parentaux et personnels) en termes de conditions d’ouverture et d’indemnisation et d’autre part sur la portabilité de ces droits et le cadre de sa mise en Å“uvre.
6 Le projet renforce les compétences du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) pour promouvoir l’égalité ainsi que la lutte contre les violences et la diffusion d’images dévalorisantes des femmes. Sur internet, les images sexistes pourront désormais faire l’objet d’un signalement.
7 Il prévoit un doublement du taux de modulation du financement des partis et groupements politiques qui ne respectent pas la parité aux élections législatives.
8 Le projet crée les conditions d’une généralisation de la parité. Il applique ce principe aux fédérations sportives et organismes consulaires et prévoit une habilitation pour le Gouvernement à intervenir par ordonnance pour traiter le cas des autorités administratives indépendantes et des principales instances consultatives de l’Etat.

Le projet de loi contre le système prostitutionnel

Le principe d’une législation nouvelle

A l’heure actuelle, le proxénétisme est très sévèrement puni par le code pénal. La difficulté, c’est la réalité. Le code pénal a été enrichi grâce à la loi du 5 août 2013 transposant la directive européenne relative à la traite des êtres humains, qui comporte des dispositions sur l’esclavage et la servitude (dont j’ai été la rapporteure à l’Assemblée Nationale https://mariettakaramanli.fr/spip.php?article656)
La nécessité de légiférer me semble évidente. Les dispositions contenues dans la proposition de loi sur la responsabilisation du client seront sans aucun doute efficaces. Le client ne peut être mis à l’écart, sachant que les prostituées ont été pénalisées avec le délit de racolage, et que les proxénètes sont sévèrement punis par le code pénal. Le bout de la chaîne, c’est-à-dire le consommateur, ne peut donc pas être ignoré.

Si la loi n’est pas parfaite, comme le reconnaissent les Suédois, les réseaux mafieux et délinquants trouvent la Suède inhospitalière cela a donc un effet sur l’ensemble de la délinquance.

Les limites et compléments à apporter

J’entends les arguments selon lesquels les nouvelles dispositions vont aggraver le mal. Nous ne pouvons pas sous-estimer les risques de dissimulation, d’éloignement, de vulnérabilité accrue des prostituées. C’est pourquoi la question des politiques publiques est essentielle pour prévenir, accompagner les personnes victimes et les réinsérer.

Je suis notamment intervenue pour m’inquiéter du déplacement de la prostitution sur le net. L’idée est de consolider les moyens dédiés et spéciaux.

J’ai interrogé la ministre des affaires sociales sur les politiques d’aide aux femmes victimes. L’information, la formation des personnels sociaux, des mesures sociales et sanitaires adaptées et les outils classiques seront mobilisés. Par ailleurs un fonds de financement est prévu.

J’ai aussi rappelé que la peur des « consommateurs » que cela se sache était aussi un facteur de dissuasion mais que cela ne suffit pas.

J’ai aussi rappelé la nécessité d’une action et d’une mobilisation entre les Etats européens et notamment frontaliers. Il faut donner « un coup d’envoi » et ne pas attendre que chaque Etat souverain le fasse sauf à laisser s’installer des réseaux