Marietta KARAMANLI a répondu au quotidien « 20 minutes » sur « Le Brexit peut-il avoir des conséquences sur la sécurité européenne? »

A l’occasion d’une demande d’entretien j’ai eu l’occasion de préciser au Journal « 20 minutes » les probables effets du Brexit sur la sécurité et la justice en Europe. Une occasion pour moi de rappeler que sur certains dossiers le Royaume Uni avait plutôt été réticent à mettre en œuvre des instruments de lutte contre le crime transfrontalier. J’ai aussi insisté sur le fait que malgré que la campagne de référendum en faveur de la sortie de l’UE s’était faite sur les thèmes de la sécurité et de l’immigration, le Royaume Uni allait perdre le bénéfice de dispositions utiles à sa propre sécurité : règlement permettant de renvoyer vers un Etat d’entrée de l’UE un migrant irrégulier, possibilité d’obtenir qu’un ressortissant de l’UE soit jugé en Angleterre par le recours au mandat d’arrêt européen…En tout état de cause, dans bon nombre d’autres domaines la coopération existe de façon bilatérale et l’UE pourrait négocier d’une seule voix au nom des Etats membres si ceux-ci en sont d’accord, la sécurité et la justice étant une compétence partagée entre l’UE et les Etats membres. Une affaire en tout cas à suivre, ce que je ferai comme députée suivant particulièrement ces questions au sein de l’Assemblée Nationale.

L’article tel que paru le 1er octobre 2016 sur le site de « 20 minutes »

http://www.20minutes.fr/societe/1932807-20161001-brexit-peut-avoir-consequences-securite-europeenne


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1 Pensez vous que le Brexit affaiblisse la sécurité européenne ? Le Brexit peut il nous priver de sources d’information importantes en provenance du Royaume-Uni notamment par le biais d’Europol ?

La sécurité européenne est un sujet relativement récent au sein de l’Union.
L’idée d’un changement brutal entre le RU et l’UE et le retour à la situation antérieure doit être nuancée.
En effet les britanniques ont souvent fait preuve de réticences à l’égard de systèmes intégrés en matière de sécurité …que l’on pense à Schengen ou à la proposition d’un parquet européen pour poursuivre les infractions financières ou les crimes les plus graves transfrontaliers. A ce titre le moment de faiblesse né du Brexit peut être le point de départ d’un nouveau départ entre Etats membres pour accélérer la mise en place de nouveaux outils.
Le paradoxe est que si le référendum a été gagné pour partie sur les questions de sécurité et d’immigration, ce sont surtout les Britanniques qui vont perdre le bénéfice de dispositifs européens.
Ainsi le règlement européen de « Dublin » obligeant un autre Etat membre, à la demande des autorités britanniques, à reprendre un demandeur d’asile entré par ce premier pays dans l’UE ne sera plus applicable.
De la même façon le RU perdra le bénéfice de la coopération poussée au sein des agences Europol et Eurojust…
Concernant le renseignement il est fort probable que le RU souhaite demander à disposer d’un statut analogue ou proche à celui des Etats considérés comme de confiance avec lesquels l’Union a des accords comme les Etats Unis et le Canada.

Le Royaume-Uni parviendra t –il à obtenir des accords bilatéraux avec les 27 membres de l’UE sur les questions de sécurité ?

Il faudra peut-être passer par des accords bilatéraux mais rien n’empêche d’imaginer que l’UE négocie au nom des autres Etats membres. En effet l’espace de liberté, de sécurité et de justice dont relève ces sujets fait partie des compétences partagées (article 4 du traité du fonctionnement de l’UE). A priori l’UE peut signer des accords internationaux dans des domaines où la compétence est partagée avec les États membres mais cela suppose que les représentants des gouvernements des États membres donnent un mandat de négociation.
De plus en matière de sécurité il y va de l’intérêt bien compris de chaque partie de disposer d’une information partagée et en quelque sorte de qualité égale. Au delà de la volonté de partager, ce sont les aspects opérationnels qui doivent être privilégiés.

Quelles conséquences pourrait avoir la perte du mandat d’arrêt européen pour le Royaume Uni ? Pour nous ?

Certains Etats européens pourraient être réticents à extrader leurs propres ressortissants devant la justice Britannique alors que le cadre du mandat d’arrêt européen ne fonctionnera plus.
Il n’est pas exclu non que dans ce domaine des solutions soient trouvées au bénéfice de tous les Etats.

source image : wikimédia commons