« Pour une épargne au service des projets des Français et de leur(s) économie(s) » par Marietta KARAMANLI

Mardi 31 janvier 2017, j’ai participé à la 26ème journée de l’Epargne et de l’Investissement avec une contribution à la première session de cette journée consacrée à l’épargne productive sur le thème « Quel rôle pour l’épargne dans le prochain quinquennat ».
Ce fut l’occasion pour moi de rappeler les paradoxes de la situation actuelle, où si les Etats sont très endettés, une épargne très importante existe peu ou pas mobilisée pour les besoins de l’économie.
Parallèlement en Europe, mais aussi aux Etats-Unis, ou en Asie, l’épargne des entreprises augmente au détriment des salaires.
Mon analyse est qu’une meilleure orientation de l’épargne ne relève pas uniquement d’incitations techniques et financières.
Pour ne prendre que le cas de l’Europe, un choc d’investissement public à l’échelle de l’Union, serait aussi un élément à même de modifier le climat des affaires et de donner des perspectives d’augmentation de la rentabilité à venir du capital.
S’il existe une insuffisance de direction de l’épargne vers l’économie réelle, plusieurs motifs peuvent l’expliquer : taux bas , contraintes prudentielles , complexité de l’épargne réglementée (trop nombreuses niches fiscales) et complexité et variabilité de la fiscalité du capital…
Premier axe d’actions, il faut sur tous ces sujets réaliser des progrès.
Par ailleurs selon moi il faut redonner aux Français un sens à leur épargne. Transmettre son patrimoine de façon « pro-active » ou avoir conscience de réaliser des projets, y compris de proximité devraient les axes d’une pédagogie de l’épargne auprès de nos compatriotes.
A ce titre l’épargne en direction des entreprises de proximité, ou de celles qui sont économiquement et socialement responsables doit être à nouveau encouragée.
Ces pistes doivent devenir les axes d’un grand plan pour l’épargne en faveur d’une économie plurielle. A mon niveau et avec l’ensemble des acteurs je souhaite y contribuer.
Marietta KARAMANLI


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« 26 ème journée de l’épargne et de l’investissement »

Mesdames et Messieurs,
Cher-e-s Collègues Parlementaires,
Tout d’abord je souhaite remercier les organisateurs de cette journée pour les opportunités qu’offre cette 26 ème journée de l’épargne et de l’investissement ayant pour thème « une épargne productive ».
Le sujet de cette première session est celui de l’épargne dans le prochain quinquennat.
Il s’agit de traiter de ce que pourraient être les axes forts d’une politique liant au mieux l’épargne et l’économie.
Mon propos sera bref.
Je souhaite mettre en évidence et perspective trois éléments.
1 Les paradoxes de la situation actuelle
2 Un environnement européen à relancer
3 Des pistes d’action visant à simplifier et à redonner un sens à l’épargne

Je voudrais évoquer tout d’abord les paradoxes de la situation actuelle

Ils sont nombreux.
D’une façon globale et dans le monde il y a aurait trop d’épargne, alors qu’on ne cesse de dire que nos économies sont trop endettées.
Une des raisons en serait la baisse des taux d’intérêt.
Il existe une tendance mondiale à la baisse des taux d’intérêt ; ceux-ci ne cessent de baisser depuis le début des années 2000.
Les banques centrales ont une part de responsabilité : depuis 2008 et la crise, elles ont en effet massivement baissé leurs taux directeurs.
C’est donc vrai mais pas que…
La baisse a commencé avant et l’action des banques centrales touche en priorité le court terme.
En Europe, Outre-Atlantique, ou en Asie l’épargne des entreprises augmente au détriment des salaires.
Côté particuliers et dans le monde les ménages mettent de côté pour des raisons diverses : achat immobilier (en Asie notamment) ; retraites (en Allemagne) ; …
Chez nous, les entreprises françaises se financent à 80 % par de la dette alors que l’épargne des Français est pourtant abondante, avec un taux d’épargne à plus de 15 % loin devant la moyenne de l’UE de 10,6 % (chiffres 2015 ?).
Pourtant les besoins sont très importants.
Cette situation est le signal à l’échelle du Monde et avec des caractéristiques propres à notre pays

 d’un manque de confiance dans l’avenir,
et
de l’absence de canaux et d’acteurs qui acheminent l’épargne et portent aussi le risque.
Ainsi le problème apparaît à la fois complexe et appelant à une forme de modestie dans les propositions et les solutions à y apporter.
Pour ne prendre que notre pays nos concitoyens associent le concept de risque à la perte d’argent et près de 40 % n’auraient pas une réflexion organisée, et si j’ose dire rationnelle, à ce sujet.
Avant d’en revenir à la France je voudrais faire un détour et m’arrêter quelques instants sur l’Europe.

Un environnement européen à relancer

Mon analyse est qu’une meilleure orientation de l’épargne ne relève pas uniquement d’incitations techniques et financières.
Malgré un coût du capital bas, en Europe les investisseurs privilégient les obligations publiques, les placements « sans risques ».
Dans un contexte d’inquiétudes (dans la zone euro avec le Brexit et les projets portés par les formations populistes de sortie de celle-ci, les tensions internationales, le terrorisme), … les paris industriels et les investissements élevés apparaissent encore plus difficiles.
Dans ce cadre, un choc d’investissement public à l’échelle de l’Union, d’une autre nature et d’une autre ampleur que le plan Juncker, serait, je pense, aussi un élément à même de modifier le climat des affaires et de donner des perspectives d’augmentation de la rentabilité à venir du capital.
J’en viens à notre pays et son prochain quinquennat.
Simplifier et à redonner un sens à l’épargne
Des estimations font valoir que sur 10 000 milliards d’euros de patrimoine, les Français en épargneraient 400 milliards.
Près des 4/5 de cette épargne serait consacrée au financement de l’Etat et des grandes entreprises.
Une très faible part moins de 4 % à 10 % irait vers les PME et ETI entreprises pourtant jugées porteuses de croissance durable.
Plusieurs interrogations existent sur les raisons de cette crise d’une épargne active : taux bas (que j’ai rappelés), contraintes prudentielles , complexité de l’épargne réglementée (trop nombreuses niches fiscales) et complexité et variabilité due la fiscalité du capital…
Premier axe d’actions, il faut sur tous ces sujets réaliser des progrès et les inscrire dans la cohérence et la durée avec la perspective de mobiliser l’épargne des Français.

L’autre grand axe du prochain quinquennat devrait être, selon moi, de redonner aux Français un sens à leur épargne.

Transmettre son patrimoine et réaliser des projets, devraient les axes d’une pédagogie de l’épargne auprès de nos compatriotes.
En matière de transmission, il conviendrait de réfléchir à favoriser les donations ce qui limiterait peut être une forme de cristallisation du patrimoine immobilier.
En matière de réalisation de projets, l’épargne salariale mais aussi l’épargne en direction des entreprises de proximité, ou celles qui sont économiquement et socialement responsables doivent être à nouveau encouragées.
Pour cela il faut un projet ambitieux (un plan peut-être ?) pour connecter les besoins et les projets à l’épargne de ceux qui pour investir ont besoin d’une certaine connaissance des entreprises mais aussi des différents produits d’épargne.
En cela l’éducation à l’économie et la redécouverte de l’envie d’épargner restent des nécessités.
Mon propos vous emblera peut-être simple mais il me semble que pour redonner envie il faut mieux comprendre et connaître, ce qui accroit la confiance.
Merci de votre attention.