Le 16 avril 2014, je suis intervenue dans la discussion d’un projet de loi relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.Ce projet de loi présente la particularité de mêler dispositions d’application directe et dispositions déléguant au pouvoir réglementaire la possibilité de prendre par voie d’ordonnances des dispositions de nature législative visant simplifier, à clarifier et à moderniser le droit sur des sujets divers.
Parmi les discussions figuraient les articles 3 et 8.
L’article 3 autorise le Gouvernement à procéder, par voie d’ordonnance, à une réforme du droit des contrats et du régime des obligations. Le Sénat l’avait supprimé et un amendement gouvernemental l’a rétabli. Comme l’a indiqué la Garde des Sceaux le droit des contrats et le régime des obligations, qui remontent au code civil de 1804, ont été modifiés par la jurisprudence, au gré de l’évolution des échanges économiques. Elle a énoncé les principes qui président à la réforme à savoir le respect du consensualisme, selon lequel il doit y avoir accord entre les deux parties pour contracter ; l’introduction du principe de la bonne foi, à toutes les étapes du contrat, depuis les discussions préparatoires, que le code civil ne prévoit pas, jusqu’à son terme ; l’encadrement des conditions de la rupture du contrat ; l’énonciation du devoir d’information ; la réaffirmation de la nécessaire prévisibilité et la protection de la partie au contrat la plus vulnérable.
De mon côté j’ai rappelé que le Parlement après délégation devrait ratifier le projet et aurait le droit de revenir sur les ordonnances si cela s’avérait nécessaire.
De son côté l’article 8 prévoit que des avis, convocations ou documents sont adressés à une personne par l’autorité judiciaire par tout moyen, par lettre simple, par lettre recommandée ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, et aussi par voie électronique, à la condition que la personne y ait préalablement consenti par une déclaration expresse recueillie au cours de la procédure. Cet accord précise le mode de communication électronique accepté par la personne. J’ai soutenu cette disposition en rappelant la nécessité de garantir que le destinataire aurait la même qualité de réception et serait en mesure de faire valoir qu’il a été bien informé. Cette disposition prend en compte le fait qu’aujourd’hui, 80 % des personnes ne vont pas chercher le courrier recommandé envoyé selon une modalité qui complique ladite réception et que l’envoi électronique devenu possible serait précédé d’un accord sur l’envoi selon cette nouvelle modalité. Il est ainsi fait le pari que l’accord des destinataires sera de nature à les rendre aussi vigilants que diligents.
Assemblée nationale, XIVe législature, Session ordinaire de 2013-2014
Compte rendu intégral
Première séance du mercredi 16 avril 2014
Modernisation et simplification du droit dans les domaines de la justice et des affaires intérieures
Suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, d’un projet de loi adopté par le Sénat
Article 3
Mme la présidente.
La parole est à Mme Marietta Karamanli.
Mme Marietta Karamanli.
Mme la rapporteure vient de fournir l’ensemble des éléments qui nous conduisent à soutenir cet amendement, mais rappelons tout de même, comme Mme la garde des sceaux l’a fait hier, que les ordonnances conservent leur caractère réglementaire tant qu’un projet de loi de ratification n’a pas été soumis au Parlement.
Or, ne l’oublions pas, celui-ci peut ne pas se contenter de ratifier. Il a aussi le droit de revenir sur les ordonnances si cela s’avère nécessaire, sachant que les dispositions dont nous discutons aujourd’hui auront, après leur examen par les deux chambres, un périmètre très circonscrit. Le cadre est posé.
Il est devenu aujourd’hui nécessaire et urgent d’avancer pour simplifier, moderniser et clarifier le droit dans ce domaine et la possibilité que nous avons de revenir sur une ordonnance si cela s’avère nécessaire nous offre suffisamment de garanties pour nous permettre, tout en gardant un regard critique sur la suite, de soutenir la volonté du Gouvernement d’aller plus vite.
Article 8
Mme la présidente.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, inscrite sur l’article 8.
Mme Marietta Karamanli.
À l’origine, le Gouvernement, entendait définir les conditions dans lesquelles l’autorité judiciaire peut transmettre des convocations, avis et documents par voie électronique aux auxiliaires de justice, aux experts, aux personnes dans le cadre d’une procédure pénale. Actuellement, seuls les avocats peuvent recevoir des documents dématérialisés.
Il s’agit d’étendre le périmètre des destinataires inclus dans une procédure dématérialisée.
Opérationnellement, cela suppose un réseau support de ces échanges dématérialisés et la détermination des moyens permettant à la justice de tracer l’envoi des documents et aux destinataires de rapporter leur réception, leur date et les effets qui y sont attachés.
La discussion a porté, au Sénat puis à l’Assemblée, non sur le principe de la transmission, mais sur la garantie que le destinataire aura la même qualité de réception et sera en mesure de faire valoir qu’il a été bien informé.
Actuellement, si les documents doivent être adressés par un courrier recommandé avec avis de réception, l’absence de prise de connaissance €“ aujourd’hui, 80 % des personnes ne vont pas chercher le courrier envoyé selon une modalité qui complique ladite réception €“ ne vaut pas absence de garantie donnée.
Si nos collègues sénateurs ont souhaité revenir sur cet allégement, le Gouvernement, de son côté, a souhaité revenir sur l’alourdissement du dispositif. Notre assemblée entend donner sa chance au nouveau dispositif, sachant que l’envoi électronique sera précédé d’un accord sur l’envoi par ladite procédure.
Nous faisons le pari que l’accord des destinataires sera de nature à les rendre aussi vigilants que diligents. Mais nous devons aussi valider l’existence d’une nouvelle hiérarchie dans la sécurité recherchée. Il s’agit moins de s’assurer que l’intéressé a pris connaissance du courrier que de garantir les conditions dans lesquelles il va le recevoir.
Si cette disposition étend la dématérialisation de la chaîne pénale, elle établit aussi un compromis entre la rapidité, la simplicité et la sécurité dues aux justiciables et aux collaborateurs du service public de la justice.
On peut la considérer comme une avancée, mais elle comporte un petit risque, lequel est toutefois inférieur aux avantages attendus en termes de célérité, d’abaissement des coûts et d’efficacité. J’estime qu’il est important d’avancer dans cette direction.
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