« Retour sur une rencontre thématique (10 déc.2021) : développer les services aux aidants , des constats aux propositions, une prise de conscience nécessaire et une implication tant nationale qu’au niveau des collectivités locales » par Marietta KARAMANLI

Le 10 décembre 2021 au Théâtre de La Bertoche et grâce à nos hôtes, j’ai organisé avec Hugues BOURGEOIS, médecin, oncologue (spécialiste du cancer) et conseiller municipal du Mans, une rencontre thématique sur la situation et l’accompagnement des aidants.

Parler des aidants c’est évoquer un sujet important qui recouvre des situations nombreuses et variées.

Quelles sont les situations où des proches deviennent des « aidants ».

Les personnes mentionnent souvent au titre des motifs, la maladie, l’âge (« personnes âgées », « vieillesse »), le handicap ou la dépendance. Assez peu se réfèrent à la «perte d’autonomie».

La famille et ses  déclinaisons (« parents », « conjoint », « enfants »…) ressortent très fortement ainsi que la notion de « proches ».

Les participants ont témoigné et échangé autour de leurs expériences et de celles de leurs proches.

L’accent a été mis sur la nécessité d’organiser et de structurer leur accompagnement alors que les aidants sont souvent dans une situation individuelle.

La question des enfants non acceptés à l’école à raison d’un handicap peu ou mal pris en charge par l’école a été évoquée.

La multiplicité des possibles financeurs et interlocuteurs a été mise en évidence.

Les réponses sont de plusieurs natures : il convient de développer une offre de services au niveau le plus proche. Les collectivités locales peuvent et doivent jouer ce rôle.

Il faut aussi que le temps passé par les aidants soit reconnu et des droits acquis pour leur retraite validés. De plus les compléments accordés au niveau familial apparaissent limités et donc insuffisants.

Les questions de la formation des aidants et des solutions relatives à l’accessibilité doivent être traitées.

Enfin l’offre de services locaux devrait permettre de proposer de l’écoute, de l’aide personnelle et matérielle et offrir des solutions pour le répit des aidants.

De façon plus large et au plan national et international, la recherche et l’offre de services techniques / technologiques doivent être soutenus et financés.

Il faut aussi construire et proposer des logements adaptés aux handicaps et pertes d’autonomie.

Cette rencontre a été riche tant par les constats opérés que par les solutions esquissées qui demandent une prise de conscience, des services divers et un accompagnement humain et matériel.

Marietta KARAMANLI

Quelques photographies de la soirée

 

Ci-après le texte de mon intervention ayant de servi d’introduction aux échanges et prises de parole.

Rencontres «  Les aidants»

Mesdames, Messieurs, Cher-e-s Ami-e-s

Tout d’abord, je souhaite vous remercier d’avoir pu être là et participer à cette réunion qui a pour thème : celui des aidants

Avant même d’aborder cette problématique très transversale, je souhaiterais dire quelques mots pour bien commencer notre rencontre.

Mon intervention, brève, sera centrée sur trois idées essentielles qui,

Visent à l’ouvrir !

1 Ce sujet est un enjeu de société. La crise sanitaire a remis en lumière que nous avions à nous interroger sur ce que sont nos activités essentielles.

Selon une étude de 2020 réalisée par le groupe BPCE et l’institut d’opinions BVA

  • 57 % des + de 15 ans ont été ou sont des aidants à des niveaux divers,
  • 29 % des aidants actuels,
  • 9 % des aidants ponctuels ;
  • et 19 % d’ex aidants.

Cela renvoie vers la définition de l’aide, de sa nature et évidemment du temps passé.

Les personnes mentionnent souvent au titre des motifs, la maladie, l’âge (« personnes âgées », « vieillesse »), le handicap ou la dépendance. Assez peu se réfèrent à la «perte d’autonomie». La famille et ses  déclinaisons (« parents », « conjoint », « enfants »…) ressortent très fortement ainsi que la notion de « proches ».

La deuxième idée est celle liée à la prise de conscience et à la reconnaissance institutionnelle et des politiques publiques de la situation des aidants.

La prise de conscience est l’œuvre de plusieurs acteurs.

Il y a les réseaux d’organisations et d’associations qui oeuvrent dans le secteur ; il y a des organisations dédiées et militantes si j’ose dire. Il y a aussi les associations comme les associations de malades ou liées au handicap et les associations familiales. Certains de ces acteurs sont réunis  dans le Collectif inter-associatif des  aidants familiaux (CIAAF).

Leur mobilisation a amené les médias à se faire l’écho de leurs combats.

Côté pouvoirs publics,

Il y a eu la loi du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement. La loi instaure un droit au répit, intégré à l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA) [1]  et un congé du proche aidant.

Il y a la stratégie de  mobilisation et de soutien en faveur des  aidants, lancée en octobre 2019  (numéro téléphonique national, lieux d’accueil labellisés, plateforme numérique pour identifier l’offre d’accompagnement dans tous les territoires).

La reconnaissance des proches aidants a été confortée par la loi du 22 mai 2019. Elle prévoit d’intégrer dans la négociation collective des branches le thème de la conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle des salariés proches aidants, l’objectif étant le recours facilité au congé. Cette conciliation revêt donc désormais un caractère obligatoire.

Un décret du 1er octobre 2020 traite de l’allocation journalière  du proche aidant et l’allocation journalière de présence parentale.

L’extension du congé de proche aidant, est prévu par le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2022. [2]

Venons en au dernier point celle d’un renforcement des droits et du développement d’initiatives nouvelles.

Il est difficile quand vous allez sur le net de connaître facilement et aisément les mesures existantes et les droits

Une évaluation du plan est en cours .

Plus fondamentalement plusieurs tendances démographiques et  sociales sont de nature à limiter la disponibilité des aidants dans les années futures alors que le phénomène risque de s’accentuer.

La diminution des générations les plus jeunes.

Les réformes des retraites. Elles ont conduit au report de l’âge moyen de départ à la retraite à 63,5 ans en 2019 contre 61,7 en 2009 et à la montée du taux d’activité des seniors : à plus de 62 %, le taux d’emploi des 50-64 ans, dépassait en 2018 son niveau de 1975

Les charges qui pèsent sur les générations dites « pivot » celle des  45-65 ans qui doivent à la fois répondre aux  besoins de leurs ascendants et de leurs enfants jeunes adultes.

En face je vois trois tendances à favoriser et organiser

1 Développer l’offre de services au niveau des collectivités locales

Par exemple ma métropole de Lyon a mis en place un  service – la Métropole aidante – qui est  plébiscitée : vous avez des gens qui appellent les aidants et leur demandent s’ils ont besoin de quelque chose. Ils gèrent la PCH Prestation de compensation du handicap, et proposent  d’expliquer ce à quoi les aidants ont droit

2 Soutenir les progrès de la médecine et l’offre des services techniques

3 Financer plus largement la perte d’autonomie liée à la maladie, le handicap et la vieillesse et l’accompagnement qui va avec !

Collectivement la question de la dépendance et l’aide aux aidants ne sont pas considérées par la société française comme devant être traitée de façon urgente.

Elles ne font pas l’objet d’une revendication sociale que l’on pourrait qualifier de « forte ».

Deux modes de prise en charge peuvent être évoqués.

D’une part la solidarité, d’autre part les dispositifs assurantiels.

Dans le cas de la solidarité, la position habituelle de l’Etat est de s’orienter vers le prélèvement obligatoire, comme il en est de la complémentaire maladie qui, de facultative, a été généralisée par voie législative ; ou comme il en a été pour la CMU.

Il y aussi le volet assurantiel qui peut être de deux natures.

Il peut être traditionnel : c’est-à-dire reposant sur une cotisation facultative qui débouche sur une rente garantie.  Ces contrats ne sont pas très développés ; d’autres suggèrent de rendre obligatoire l’adhésion à une assurance dépendance.

Au final il y a certainement à faire progresser la réflexion sur un mélange complémentaire entre la solidarité indispensable et la technique assurantielle notamment collective.

En tout état de cause la réflexion collective devrait être mieux portée et l’expérience des autres Etats européens devrait être mieux partagée.

Je vous remercie pour votre attention.

[1] Quand celle-ci est insuffisante pour financer un hébergement temporaire ou augmenter le volume d’heures d’aide à domicile, le droit au répit prévoit l’accueil de la personne en perte d’autonomie dans un hébergement temporaire, pouvant être financé jusqu’à 500 € par an, au-delà des plafonds de l’APA, permettant au proche aidant un temps de repos , en cas d’hospitalisation de l’aidant, la loi prévoit également un dispositif permettant de financer une aide supplémentaire auprès de la personne dépendante.

[2] La réforme se traduira par l’ouverture de ce congé à un plus grand nombre d’aidants (ceux des personnes classées en GIR4, les conjoints collaborateurs…) et par une revalorisation au niveau du Smic. Cette revalorisation s’appliquera également à l’AJPP (allocation journalière de présence parentale), destinée aux parents d’enfants malades ou handicapés.