« Réforme du permis de conduire visant à améliorer les délais de passage des candidats, une avancée mais des améliorations à trouver pour tous les candidats » par Marietta KARAMANLI

Source image, capture depuis la vidéo de la séance sur le site de l’Assemblée Nationale

Le 23 mars 2023 je suis intervenue en séance publique lors de la discussion d’une proposition de loi visant à améliorer les délais de passage des candidats au permis de conduire.

Une disposition crée une plateforme numérique nationale d’information et d’orientation, gérée par l’État, qui devrait faciliter l’accès des candidats aux informations et aux aides financières disponibles – cette plus grande accessibilité est par nature positive.

Une deuxième a trait au recours par l’État à des agents publics ou contractuels en qualité d’examinateurs autorisés à faire passer l’épreuve pratique du permis de conduire des véhicules du groupe léger. C’est de cette dernière disposition qu’est attendu un mieux dans les délais d’attente pour les candidats.

Néanmoins comme je l’ai rappelé le délai d’attente n’est pas dû uniquement à un manque d’inspecteurs : le taux de réussite à l’examen et le nombre moyen de passages posent aussi problème. Depuis 2016, l’administration peut embaucher des agents publics et contractuels quand le délai d’attente médian est supérieur à quarante-cinq jours. Très peu de départements seraient en fait concernés. La proposition de loi supprime ce délai médian préexistant qui limitait la possibilité de recourir à des agents publics ou contractuels.

 En pratique, ceux qui connaissent des délais d’attente sont les 40 % de candidats qui ont échoué au moins une première fois à l’examen il y a aussi ceux qui  renoncent d’eux-mêmes à repasser l’examen en raison du prix à payer, soit 2 000 euros pour la formation théorique, et les vingt heures de conduite pratique en véhicule à boîte de vitesses manuelle.

Certains faibles taux de réussite pourraient s’expliquer, d’une part, par le fait que certains publics ont moins de facilités face aux épreuves et, d’autre part, par le niveau même de formation dispensée par quelques établissements. Le texte n’instaure pas un  dispositif de financement qui ouvrirait largement le permis à tous les jeunes, tout en garantissant partout la qualité de l’apprentissage. J’ai appelé à ce que de nouvelles opportunités soient offertes aux jeunes pour préparer, passer et réussir le permis en conciliant un meilleur taux de réussite et une qualité de la formation.

Le texte de mon intervention en séance

 M. le président

La parole est à Mme Marietta Karamanli.

Mme Marietta Karamanli

La proposition de loi en discussion vise à diminuer les délais d’attente pour passer le permis de conduire, examen qui sanctionne un niveau de connaissances et une aptitude à circuler. Le délai de passage du permis de conduire est un problème récurrent pour de nombreux candidats, qui persiste depuis de longues années.

Le présent texte comporte trois dispositions essentielles.

La première concerne la création d’une plateforme numérique nationale d’information et d’orientation, gérée par l’État, qui doit faciliter l’accès des candidats aux informations et aux aides financières disponibles – cette plus grande accessibilité est par nature positive.

La deuxième disposition est relative à l’utilisation du compte personnel de formation pour accéder au permis pour les motos légères, les voiturettes et les remorques plus lourdes. En l’état, le CPF est limité à certains types de permis, dont le permis B. Les autres permis qui seront désormais accessibles par le biais de ce financement sont souvent importants pour devenir artisan ou indépendant. Nous devrons néanmoins veiller à ce que le CPF finance des formations qui mènent à l’emploi, et non des permis dépourvus de tout lien avec celui-ci.

La troisième disposition a trait au recours par l’État à des agents publics ou contractuels en qualité d’examinateurs autorisés à faire passer l’épreuve pratique du permis de conduire des véhicules du groupe léger. Il y a quelques mois, le recours aux plateformes censées faciliter l’inscription à l’examen était perçu comme une solution aux problèmes de délai. Malheureusement, nous avons constaté que cela ne fonctionnait pas. Il faut évidemment s’attaquer aux vraies causes : le manque d’inspecteurs en fait partie, mais ce n’est pas le seul élément.

Dans certains lieux, il y a parfois trois ou quatre mois d’attente avant qu’un élève puisse obtenir une date. En l’état, les inspecteurs sont d’anciens moniteurs qui ont la connaissance et l’expérience des difficultés et des enjeux attachés à l’apprentissage de la conduite. Leur jugement est nourri par leurs expériences pédagogiques, relationnelles et pratiques. L’enjeu est donc celui de la formation et de la qualification des agents venant en appui des inspecteurs en poste.

Monsieur le rapporteur, vous avez indiqué que les agents publics recrutés pour jouer le rôle d’inspecteur devront suivre une formation de six mois. Ils seront d’ailleurs chargés d’autres missions, telles que des actions de sécurité routière, de suivi des établissements d’enseignement de la conduite et de la sécurité routière et de contrôle de centres de stages de sensibilisation à la sécurité routière. Les agents contractuels qui seront recrutés pour faire passer les examens seront quant à eux soumis à une formation de deux mois.

Il s’agit de dispositions qui relèvent pour partie du pouvoir réglementaire – j’espère que le Gouvernement entendra notre demande –, mais rien ne nous empêchait de réexposer explicitement le principe d’un recrutement subordonné à une formation.

J’en viens aux autres causes d’un délai d’attente anormal pour passer l’examen du permis de conduire. Le présent texte actera bel et bien une avancée, mais, pour un grand nombre de candidats, celle-ci pourrait n’être qu’un trompe-l’œil. Il semblerait que le délai d’attente ne soit pas uniquement le fait d’un manque d’inspecteurs : le taux de réussite à l’examen et le nombre moyen de passages posent aussi problème. Depuis 2016, l’administration peut embaucher des agents publics et contractuels quand le délai d’attente médian est supérieur à quarante-cinq jours. Très peu de départements seraient en fait concernés. La proposition de loi supprime ce délai médian préexistant qui limitait la possibilité de recourir à des agents publics ou contractuels. En pratique, ceux qui connaissent des délais d’attente sont les 40 % de candidats qui ont échoué au moins une première fois à l’examen. Et je ne compte pas ici ceux qui renoncent d’eux-mêmes à repasser l’examen en raison du prix à payer, soit 2 000 euros pour la formation théorique, et des vingt heures de conduite pratique en véhicule à boîte de vitesses manuelle.

Je pense à ce nombre non négligeable de candidats inscrits dans des auto-écoles dont les taux de réussite à l’examen sont faibles. Ces taux pourraient s’expliquer, d’une part, par le fait que certains publics ont moins de facilités face aux épreuves et, d’autre part, par le niveau même de formation dispensée par quelques établissements.

C’est pour ces candidats en attente de réussite que les délais sont trop longs. Le présent texte est intéressant dans le principe, mais il ne traite ni des zones grises de la formation ni du prix élevé et de la qualité de celle-ci. Il ne promeut pas non plus de dispositif de financement qui ouvrirait largement le permis à tous les jeunes, tout en garantissant partout la qualité de l’apprentissage. L’enjeu est pourtant d’éviter que l’augmentation du nombre d’inspecteurs élève le nombre de candidats reçus sans forcément améliorer leur niveau – ce sont bien les meilleurs candidats qui sont gage d’une sécurité plus grande au volant !

Notre groupe, bien entendu, soutient ce texte. Toutefois, nous appelons l’attention de nos collègues et du Gouvernement sur l’importance de la vie quotidienne – un sujet qui nous tient à cœur. Ce texte apporte peut-être une éclaircie, mais pas forcément le printemps d’une meilleure réussite à l’examen du permis. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe Dem.).